Ce premier roman a été nommé « Meilleur livre de l’année » par le New York Times lors de sa parution en anglais. On y rencontre trois femmes dans un petit village de pêcheurs, en Jamaïque : Delores, la mère, et ses deux filles, Margot et Thandi, nées à 15 ans d’intervalle, de deux pères tous deux absents.

Thandi, qui va bientôt fêter ses 16 ans, est la seule à avoir le potentiel pour « devenir quelqu’un » et sa famille place tous ses espoirs sur ses maigres épaules, s’attendant à ce que ce soit elle, par ses études, qui réussisse à les sortir de la case miséreuse où elles habitent.

Sa sœur aînée paie les frais de scolarité du collège privé catholique qu’elle fréquente en assouvissant, le soir, les désirs sexuels des clients de l’hôtel où elle travaille de jour comme réceptionniste. Or, pendant que leur mère vend des souvenirs aux touristes au marché et que l’ambitieuse Margot cherche à monter dans l’échelle sociale de l’hôtel pour ne plus avoir à se prostituer, tout en menant une double vie, Thandi rêve d’être artiste et néglige ses études. Obsédée de surcroît par l’idée de se blanchir la peau, elle multiplie les traitements pour devenir aussi pâle que les filles de son école – et ainsi garantir son avenir au sein d’une société où l’ascension professionnelle est liée à la couleur.

Nicole Dennis-Benn, qui enseigne aux États-Unis depuis qu’elle a quitté son pays natal, donne une voix à ces êtres invisibles au yeux des touristes qui ne voient que le sable blanc des plages, ignorant la misère et la destruction que la frénésie hôtelière sème sur son passage. Derrière ces murs aux teintes vives se cache par ailleurs une société qui continue de souffrir du colonialisme et qui, par son homophobie, notamment, est capable d’une violence sans bornes envers les siens. Une lecture inoubliable qui ne rend que plus vive notre impatience devant la traduction du deuxième roman de l’auteure, Patsy.

Rends-moi fière

Rends-moi fière

Éditions de l’Aube

413 pages

8/10