Journaliste de profession, la Canadienne aux racines germano-hongroises Zsuzsi Gartner s’est fait connaître par ses recueils de nouvelles.

Elle signe avec ce premier roman, Le Malenchantement de sainte Lucy, un récit kaléidoscopique, hautement original, souvent déstabilisant, finaliste au Prix Rogers Writers’Trust.

Lucy, une femme dépressive vivant à Vancouver, voit son existence chamboulée après la mort de son cousin Zoltán des suites d’une histoire presque trop incroyable et horrible pour être vraie, dont il lui confesse les détails avant de mourir. À partir de ce moment, elle deviendra un « mur des Lamentations en chair et en os ».

La structure du roman, inspirée des Confessions de saint Augustin, donne à lire ces confessions dont la narratrice se nourrit comme un vampire : un fœtus qui assassine sa jumelle dans le ventre de sa mère, un jeune garçon amoureux fou d’une religieuse qui fera périr par le feu un prêtre, même des plantes qui crachent leur haine viscérale des humains et leur plan pour éradiquer la race !

L’imagination de Gartner est exubérante, étrange. Le roman, très touffu, satire distopique à l’écriture parfois surréaliste, prend la forme d’un pavillon des miroirs où on perd parfois ses repères, de poupées russes qui s’emboîtent sans fin, où le passé et le futur tourbillonnent, interchangeables. « Nous pensons nous souvenir du passé et imaginer le futur. Et si en réalité, c’était l’inverse ? », lancera la narratrice. Une lecture fascinante, mais difficile ; on a l’impression, une fois la dernière page tournée, qu’il faudrait relire le roman plusieurs fois pour en comprendre toutes les fines interconnexions.

Le malenchantement de sainte Lucy

Le malenchantement de sainte Lucy

Éditions Alto

256 pages

7/10