La grogne sur les réseaux sociaux autour d’une librairie, du quartier Mile End à Montréal, qui risque la fermeture à la suite d’une hausse de loyer demandé par l’agence immobilière Shiller-Lavy a fait écho jusqu’en Estrie où habite Louise Penny, l’autrice de la série de romans à succès Armand Gamache enquête.

> (Re)lisez la chronique de Marc Cassivi « Qui achète encore des livres ? »

L’autrice a témoigné de son affection envers le secteur qui fait partie de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, où elle a déjà habité, en invitant le grand public à encourager le commerce local.

« Nous devons soutenir et défendre nos librairies. […] Elles sont un élément vital d’une communauté dynamique. Comme toutes les petites entreprises indépendantes », a-t-elle écrit sur sa page Facebook vendredi.

Dimanche, la publication cumulait près de 10 000 mentions « J’aime » et des milliers de partages.

Celle qui prépare un ouvrage à paraître cet automne en collaboration avec l’ex-secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, a également souligné l’initiative qu’organise le mouvement citoyen Mile End Ensemble pour soutenir la librairie S. W. Welch.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Louise Penny

« Les gens sont invités à apporter un livre et à lire en file pendant qu’ils attendent leur tour pour acheter un livre en magasin (s’ils en ont les moyens), et à se rassembler pour soutenir l’histoire, la culture et les propriétaires de petites entreprises du Mile End », a-t-elle ajouté.

L’évènement qui se tiendra le 13 mars prochain a été baptisé : « Qui achète encore des livres aujourd’hui ? »

Une réponse directe à celle donnée par le propriétaire d’immeuble qui juge le modèle d’affaires de la librairie de livres usagés située sur la rue St-Viateur, dépassé.

Sur Instagram, des messages dénonçant ce que plusieurs voient comme une attitude cavalière ou un manque d’empathie de la part du propriétaire, en pleine crise sanitaire, ont fait ressurgir le débat sur l’embourgeoisement des quartiers prisés de la métropole.

Perdre un caractère unique

Devant l’avidité apparente des propriétaires commerciaux, certains résidents du Mile End comme Saelan Twerdy, qui y habite depuis 2015, craignent de perdre ce qui fait son caractère unique.

Il se désole de voir quelques-uns de ses commerces favoris fermer les uns après les autres. Le déménagement du Cagibi, un café installé aujourd’hui dans la Petite Italie, a été un dur coup pour celui qui a eu un coup de foudre pour la ville en fréquentant notamment ce lieu autrefois emblématique du coin.

« La fermeture de ces commerces est une tragédie, dit-il. Et je crois que les promoteurs immobiliers en sont en partie responsables. Évidemment la faute ne repose pas entièrement sur eux. »

Il déplore cependant la situation. Selon lui, la plupart des propriétaires qui détiennent des immeubles dans le coin ne vivent pas dans le quartier.

« Ils se préoccupent peu du tissu social et économique de l’arrondissement, de ce qui le rend unique et des institutions qui ont bâti sa réputation. La spéculation immobilière chasse les commerces indépendants qui font le charme du coin », est-il d’avis.

Celui qui est aussi membre du collectif Mile End Ensemble a l’impression que la plupart de ces agents aimeraient surtout voir de grandes chaînes s’implanter, comme Lululemon et Starbucks.

« Mais si leur plan est mené à terme, notre quartier finira par ressembler à n’importe quel autre quartier sur la planète, affirme-t-il. Et je ne pense pas que ce soit ce que les résidents veulent ou ont même besoin. »