« Je ne me souviens plus qui m’a dit : quand il ne se passe rien dans une histoire, tue quelqu’un, sors une arme ou un sexe mal intentionné. Ah bon… Mais ça va, pas besoin d’en rajouter, il y en a déjà beaucoup, très bien écrites et tout, des collections entières », offre en clin d’œil un des personnages du très charmant nouveau recueil de nouvelles de Natalie Jean, au titre tout aussi charmant, Le goût des pensées sauvages.

Un passage qui résume bien le goût de la romancière de Québec pour la beauté cachée dans les petites choses, l’émerveillement devant l’ordinaire et l’envie folle de saisir à bras le corps cette vie qui palpite, extraordinaire et émouvante dans sa banalité. Celle qui revient à la nouvelle après deux romans déploie une galerie de personnages touchants, vivants, lumineux, légèrement décalés dans ce monde moderne où on carbure à l’apparence et aux résultats. Ils sont à la recherche de douceur, de lenteur, de sens, d’amour brûlant, vibrant, plus grand que nature. Une fille qui lance des pétales de fleurs sur les passants pour faire naître la poésie, un homme qui, pas particulièrement gâté par la nature, prend le parti de se concentrer sur ses atouts, dont celui pour le bonheur, une jeune ado qui renoue tout en douceur avec son père manquant… Ces instantanés de vie nous laissent légers, le sourire aux lèvres. Une lecture qui fait du bien en ces temps parfois sombres.

Le goût des pensées sauvages, Natalie Jean, Leméac, 144 pages, ★★★½