Alors que le milieu du livre québécois affronte la crise, les lecteurs en confinement se tournent vers les plateformes numériques.

Le Dr Horacio Arruda l’a répété en point de presse : c’est le moment idéal pour lire.

Comme les gens évitent de sortir de la maison et que les librairies ferment les unes après les autres, les lecteurs québécois se tournent donc vers les plateformes numériques pour acheter ou emprunter des livres.

« Les ventes explosent sur le site leslibraires.ca », affirme Jean-Benoît Dumais, directeur général de la coopérative Les libraires. « On parle d’une augmentation de 400 %. Et on note la même activité du côté des bibliothèques publiques. Elles sont fermées, mais continuent de faire l’acquisition de licences de livres numériques pour répondre à la demande croissante d’emprunts observée au cours des derniers jours. »

M. Dumais observe également une augmentation du côté de la vente de livres audio et numériques. « On observe beaucoup de solidarité dans la chaîne du livre », note-t-il.

Des parutions annulées

Cette bonne nouvelle n’atténue toutefois pas les difficultés qu’éprouve le milieu du livre québécois qui est fortement secoué par les conséquences de la COVID-19. En plus des nombreuses librairies qui ferment, des parutions de livres sont repoussées ou carrément annulées. Le distributeur Prologue a quant à lui annoncé l’annulation des offices de mercredi prochain. Au total, 15 éditeurs québécois sont touchés.

Du côté des éditions Les Malins, qui publient la série La vie compliquée de Léa Olivier, c’est une très mauvaise nouvelle. 

Le livre sortait en même temps que la série télé, on vient de manquer le momentum. Nos livres sont dans des camions, on a des inventaires, des imprimeurs à payer. Je ne critique pas leur décision, j’aurais pris la même, mais là, on est dans les plans d’urgence.

Marc-André Audet, propriétaire des éditions Les Malins

Il n’est pas le seul éditeur à devoir annuler la sortie d’un best-seller potentiel. Le nouveau roman de la populaire Louise Tremblay-d’Essiambre, Du côté des Laurentides, tome 2 – L’école du village, ne paraîtra pas lui non plus. « Dans le contexte, ce ne serait pas rendre service aux auteurs et aux éditeurs que de publier leur livre », affirme Émilie L. Laguerre, directrice des communications et des partenariats pour Prologue et Renaud-Bray. Mme Laguerre affirme toutefois que le site renaud-bray.com enregistre lui aussi une augmentation de ses ventes depuis le début du confinement volontaire.

« La situation bouge d’heure en heure », note Jean Paré, directeur général de Guy Saint-Jean éditeur, lui-même en quarantaine depuis son retour de Londres. L’éditeur de Louise Tremblay-d’Essiambre souligne que toutes les nouveautés qui devaient paraître dans les prochaines semaines ont été annulées. 

« Par contre, ça réagit très fort du côté des grandes surfaces encore ouvertes, comme Walmart ou Costco, ainsi que dans les pharmacies, ajoute-t-il. Les gens achètent des livres. Costco nous a demandé un assortiment de livres qui pourraient intéresser les gens dans le contexte particulier que nous vivons. Le parascolaire est aussi très fort. Les parents cherchent à occuper les enfants qui ne fréquentent plus l’école. »

Du côté de Druide, autre éditeur distribué par Prologue, on se dit moins touché par la suspension des offices, car la plupart des nouveautés du printemps étaient déjà sorties. « On a annulé la publication d’un collectif qui devait paraître début avril, note l’éditrice Anne-Marie Villeneuve. On travaille sur l’automne et on espère que ça ne durera pas trop longtemps. »

Mais Marc-André Audet pense que si la crise liée au coronavirus dure trop longtemps, les acteurs plus fragiles tomberont. « Notre industrie va avoir besoin d’aide », lance le patron des Malins, dont les 10 employés viennent d’accepter une diminution de salaire, le temps de traverser la crise.

Pour l’instant, les autres distributeurs comme Dimedia et Socadis poursuivent leurs activités, tout en surveillant l’évolution de la situation. « Nos sorties de livres d’avril sont maintenues », confirme Marie-Eve Provost, directrice des communications aux Éditions Robert Laffont/XO, distribuées par Socadis. « Nous maintenons aussi la sortie du nouveau Kathy Reichs le 3 avril prochain. La seule chose qui pourrait changer, c’est si les librairies ne veulent plus recevoir de nouveautés ou si elles ferment. Toutefois, nous reporterons certains titres de mai. » 

Les messageries ADP, propriété de Québecor, n’ont pas rappelé La Presse.

#lireenchœur

Face aux nombreuses annulations des salons du livre, des causeries littéraires et des fermetures de librairies, la riposte s’organise. L’Association des libraires du Québec (ALQ) lancera ce vendredi la campagne web #lireenchœur. L’objectif : permettre aux gens en confinement d’échanger autour de la littérature sans quitter leur salon. 

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Catherine Trudeau, comédienne et écrivaine

Des libraires et quelques écrivains chouchous, comme Patrick Senécal, Catherine Trudeau et Patrice Godin, ont confirmé leur participation. 

Au programme : prescriptions littéraires, vidéos et clavardage en direct tous les jours à 15 h. On annoncera prochainement le nom des illustrateurs qui ont accepté de faire du dessin en direct. Le détail se retrouvera sur le site de l’ALQ.

> Consultez le site de l’ALQ : https://www.alq.qc.ca/