Une journaliste reçoit un message, émoji enveloppe. Le gars qui écrit aimerait lui lancer des fleurs au sujet de son travail, émoji rose.

Accompagné d’un peu de tendresse, émoji trace de rouge à lèvres. Et très vite, de sous-entendus sexuels, émoji petit démon. Puis, de conseils pour améliorer son travail, émoji biceps. Et d’une invitation à en parler autour d’un verre, émoji bouteille de champagne. Mais elle refuse ses avances, émoji bonhomme qui pleure. Il commence à l’embêter, émoji bombe. Se met à la menacer, émoji pistolet. À l’insulter, émoji caca.

Sur une lancée, l’homme se met alors à rédiger des articles diffamatoires sur son blogue, récoltant des dizaines de mentions J’aime. Les commentaires sous ses textes sont parsemés de vulgarités et d’invitations lancées à la narratrice. « S’il vous plaît, bien vouloir se suicider ». Quand elle bloque ce type sur Facebook, il l’attaque sur Twitter, quand elle le bloque sur Twitter, il se met à lui envoyer des textos, quand elle change de numéro, il la retrouve sur WhatsApp.

La construction, la forme, l’écriture… Tout de ce second roman de Myriam Leroy est atypique, surprenant. Enfin, on dit roman, mais il s’agit plutôt de son histoire. Celle du harcèlement virtuel que la journaliste et écrivaine belge aura subi, incessant. Et dont elle rend compte dans ce récit tranchant en rapportant les réactions de son copain qui commence à la trouver un peu lourde. De ses amis qui lui disent qu’elle exagère. Du procureur qui comprend, mais ne peut agir. Tous ces commentaires paternalistes, méprisants, réalistes qui l’amènent à avoir Les yeux rouges. Un livre dur, qui rentre dedans, éminemment actuel et intelligent. Émoji cœur

Les yeux rouges, Myriam Leroy, Seuil éditeur, 192 pages