(Istanbul) Un tribunal turc a ordonné lundi la remise en liberté sous contrôle judiciaire du journaliste et écrivain Ahmet Altan, à l’issue d’un nouveau procès après l’annulation d’une première condamnation à la prison à vie liée à un putsch manqué.

Selon l’agence de presse étatique Anadolu, M. Altan a été condamné à 10 ans et demi de prison, mais le tribunal a demandé sa libération sous contrôle judiciaire en raison des plus de trois années qu’il a déjà passées derrière les barreaux.

Le même tribunal a par ailleurs condamné la journaliste et auteure Nazli Ilicak à huit ans et neuf mois de prison, mais également ordonné sa remise en liberté sous contrôle judiciaire pour les mêmes raisons.

Accusées d’être impliquées dans une tentative de coup d’État qui a visé le président Recep Tayyip Erdogan en 2016, ces deux figures intellectuelles majeures en Turquie avaient été condamnées en 2018 à la prison à perpétuité.

Mais en juillet dernier, la Cour de cassation a annulé leur condamnation, estimant que les deux écrivains n’auraient pas dû être jugés pour tentative de putsch, mais pour avoir « aidé un groupe terroriste », un chef d’accusation passible d’une peine d’emprisonnement plus faible.

C’est précisément sur la base de ce nouveau chef d’accusation que M. Altan, 69 ans, et Mme Ilicak, 74 ans, ont été condamnés lundi.

M. Altan et Mme Ilicak ont été arrêtés dans les mois ayant suivi la tentative de coup d’État en 2016, qui a donné lieu à des arrestations massives qui ont frappé de plein fouet les milieux médiatiques et intellectuels.

Le frère d’Ahmet Altan, le journaliste Mehmet Altan, a par ailleurs été acquitté par le même tribunal lundi. Il avait été remis en liberté l’an dernier après avoir lui aussi été condamné, mais la Cour de cassation avait demandé à ce qu’il soit innocenté.

M. Altan et Mme Ilicak, des intellectuels respectés en Turquie, ont toujours nié toute implication dans la tentative de coup d’État, rejetant des accusations « grotesques ».

Ils étaient notamment accusés d’avoir envoyé des « messages subliminaux » lors d’une émission retransmise en direct à la télévision à la veille du putsch manqué.

Pour les défenseurs des frères Altan et de Mme Ilicak, cette affaire est emblématique des atteintes à la liberté d’expression qui se sont multipliées après la tentative de putsch.

Ahmet Altan s’est notamment fait connaître en dehors de Turquie par son récit de sa vie en prison, notamment dans le livre Je ne reverrai plus le monde, paru cette année en France aux éditions Actes Sud.