« Franchir les solitudes. » C’est le thème qu’a choisi la direction du Festival du Jamais lu pour sa nouvelle fournée de textes dramatiques. Mots choisis de quatre auteurs participants.

Dave Jenniss

L’artiste autochtone Dave Jenniss, qui est aussi le directeur artistique du Théâtre Ondinnok, a écrit La cendre de ses os. Quelques années après la mort de son père, le Malécite Martin Katanish retourne sur la terre de ses ancêtres, au Nouveau-Brunswick. Là-bas, il s’engage dans un débat sur le lieu où iront les cendres de son père.

« Cent. Un 1 avec deux 0. Le cercle, l’infini. Y’a personne d’immortel, mais y’a l’animal. J’me sens pas bien. Y’a trop de monde. Je suis pas sûr… j’ai les yeux pleins d’eau et le cœur qui veut fendre en deux. Cent, comme si je venais de faire le 100 m style libre. Je reprends mon souffle, je m’approche, mes genoux cassent comme deux arbres abattus à coup de hache. Pis je te vois au loin, exposé comme une œuvre d’art, un artisanat de notre nation. Pis le frère, avec sa grande gueule qui doit s’inventer des souvenirs pour ben paraître. Sa blonde le regarde pis c’est vide, vide de sens, vide d’amour. Mais c’est ça, la vie dans la petite place, la plus belle s’accroche au plus con, parce qu’a pas d’autre choix. Ça sent l’âme perdue… la douleur pesante de la mort. »

Aux Écuries le 9 mai, 20 h

Maxime Champagne

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Maxime Champagne

Maxime Champagne a écrit une pièce de théâtre documentaire (Champion) sur un sujet qui le passionne : la lutte professionnelle. Au cours de ses recherches et de ses entrevues, il a appris que son voisin de duplex (Dave Racicot) était un lutteur, « champion d’Hochelaga ».

« Bonsoir. À mes débuts, y m’ont dit : “On a besoin d’un méchant, mais tu passeras pas comme méchant, t’es trop jeune.” J’avais 15 ans, pis une babyface. J’étais pas crédible. Faqu’y fallait me masquer. Dans ma logique, dans la vie, y’a trois sortes de masqués : y’a les Japonais, les Mexicains pis les Québécois B.S. qui ont décidé de porter un masque. Moi, j’suis comme, j’ai sorti beaucoup avec des Asiatiques, quelques-unes disons. Pis le style japonais m’intéressait beaucoup. Faque j’étais Kasuko Hiroshima, un Japonais masqué. Avec un prénom féminin, en passant. Pis après, j’ai été démasqué, quand j’ai eu une face d’adulte, une face crédible. Je suis devenu Jay Phenomenal. »

Aux Écuries le 6 mai, 20 h

Alix Dufresne

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Alix Dufresne

C’est avec son projet Parle à ton voisin que s’ouvriront les festivités du Jamais Lu ce soir. Alix Dufresne a lancé l’invitation à plusieurs auteurs, qui ont accepté d’écrire et lire un texte de leur cru. Parmi eux, Geneviève Pettersen, Manal Drissi, Frannie Holder et Simon Boulerice.

« Écris une lettre à ton voisin. Une lettre à ce que TU considères être un voisin. Ça peut être un groupe de gens à qui tu n’as jamais parlé, ça peut être quelqu’un avec qui tu partages ta maison, ça peut être une personne avec une fonction, OU PAS. C’est toi qui choisis. La seule règle : tu libères quelque chose quand tu lui écris. Tu peux libérer ta colère envers ton voisin. Tu peux libérer ton amour pour lui. Tu peux libérer une parole que tu ne lui as jamais dite, mais ça doit te faire du bien quand tu la dis. Attention ! N’enfonce pas de porte déjà ouverte, prends des risques, commets-toi ; entre voisins, on ne juge pas. »

Aux Écuries ce soir, 20 h

Mellissa Larivière

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Mellissa Larivière

La fondatrice du festival d’art vivant Zone Homa, devenu simplement ZH, a écrit un long texte baptisé Écorchure sur bras inerte. Isolée à la suite de la mort de sa mère et de sa sœur, Francine, la cinquantaine avancée, devient l’aidante naturelle de sa voisine.

« J’ai ouvert ma porte juste pour voir. Y’en a un qui est rentré. Pis un autre, pis un autre. Laisser rentrer tous les chats qui passent. Leur trouver une famille, leur trouver de l’amour, à ces petites bêtes-là. Du poil en vol aérien dans mon couloir tous les jours. Dans le fond de ma gorge. Une odeur acide dans l’air. Trébucher sur des boules de chair au réveil. Nourrir les miaulements. Arrondir les fins de mois. J’vends des chats sur eBay. Je regarde par la fenêtre. Le matin à 8 h. Vers 15 h. Pis 19 h. Juste pour voir. Regarder la voisine d’en face la tête teinte en blonde, avec sa visite. Ses enfants, ses petits-enfants. J’suis pas jalouse. Voir qu’on me voit regarder. »

Aux Écuries demain soir, 20 h.

Consultez la programmation complète : http://www.jamaislu.com