L'écrivain et grande figure de l'intelligentsia allemande, Walter Jens, est décédé à l'âge de 90 ans, a-t-on appris auprès de l'Université de Tübingen où il était professeur.

M. Jens, écrivain et chercheur en philologie, avait été à la tête de l'Académie des Arts de Berlin et faisait figure d'autorité morale dans l'Allemagne d'après guerre.

La chancelière Angela Merkel a présenté ses condoléances et salué «l'un des intellectuels les plus importants de notre pays», selon son porte-parole Steffen Seibert. «Tout au long de ces dernières décennies, sa voix a donné le ton des principaux débats intellectuels et politiques», a-t-il souligné au cours d'un point de presse gouvernemental régulier.

Dans des essais passionnés publiés par plusieurs journaux, Jens avait plaidé pour que l'intellectuel soit le défenseur de la démocratie allemande naissante et s'était fait l'avocat d'un discours politique fondé sur une culture de la tolérance.

Son attachement à une figure de l'intellectuel engagé et combatif lui valut d'être comparé aux penseurs français des Lumières et d'être surnommé «le petit Voltaire de la République allemande».

Il prêchait sans détour pour une réconciliation entre juifs et chrétiens en Allemagne et s'était par ailleurs opposé à l'intervention américaine en Irak en 2003.

Mais la révélation, la même année, de son engagement au sein du parti nazi pendant la Seconde guerre mondiale - un élément dont il affirmait ne pas se souvenir - a terni son aura. Son fils, Tilman Jens, l'attaqua publiquement, lui reprochant d'être resté silencieux à ce sujet. «Tous ceux qui n'ont été ne serait-ce qu'un tout petit peu nazis sont discrédités», affirma-t-il, avant de, plus tard, prendre sa défense.

Walter Jens a affirmé qu'il avait été «automatiquement» enregistré au sein du parti après son passage au sein des Jeunesses hitlériennes mais a reconnu qu'il aurait dû faire plus tôt la lumière sur ces faits.

«Je comprends que de nombreuses personnes puissent être déçues à mon égard», avait-il affirmé à l'époque. «Si j'avais voulu être complètement honnête, il aurait été plus approprié que je sois clair là-dessus un peu plus tôt, par exemple à la fin des années 50 ou au début des années 60».

Il travaillait très étroitement avec son épouse Inge et ils publièrent notamment ensemble une biographie de Katia Mann, la femme de Thomas Mann, qui révélait l'influence de cette dernière sur l'oeuvre de son mari.