La première journée du colloque L'humour, quosse ça donne?, premier du genre ici, s'est terminé sur un débat: Méprise-t-on les humoristes au Québec? À une telle question, les réponses sont multiples.

D'abord, parce qu'autour de la table, hier, on a réuni des humoristes, gérant d'artistes et journalistes-critiques. Et qu'en fin de discussion, des étudiants à l'université, étudiants en humour, humoristes et auteurs, ainsi que la directrice enflammée de l'École nationale de l'humour, présents dans la salle aux deux tiers pleine, ont également pu ajouter leur grain de sel.

 

Pertinente la question? Un faux débat, selon l'animateur et auteur Benoît Dutrizac. Oui, selon Christian Vanasse, des Zapartistes, le premier à s'être lancé dans l'arène. «Oui, il y a un mépris d'une élite intellectuelle. On reproche aux gens du milieu de l'humour ce qu'on ne reprocherait jamais à ceux du milieu de la chanson, alors qu'il s'y fait des inepties.»

«Mépris est un grand mot, a poursuivi Dutrizac. On peut critiquer. Il y a de bons humoristes et des pourris. Une Denise Bombardier a le droit de critiquer la qualité de la langue, car c'est Denise Bombardier. On a le droit de ne pas l'écouter...»

Pendant 45 minutes, la discussion a louvoyé entre mépris, critique, nombre trop élevé d'humoristes au Québec selon certains, engagement social nécessaire des humoristes selon d'autres et moyens qu'ils n'ont pas toujours pour offrir un produit à part.

«En humour, la recherche n'est pas encouragée, note Christian Vanasse. On encourage plutôt le conventionnel. On ne donne pas les moyens aux humoristes de pousser leur réflexion, ce qui conduirait à plus de diversité.»

Cela dit, la majorité de la discussion a évidemment tourné autour de la critique que d'aucun croit provenir d'une certaine élite. Ce que réfute Dutrizac. «Dès qu'on critique, on devient intello et antéchrist de l'humour.»

Et si elle était saine la critique? Ce qu'estime le gérant Jacques K. Primeau (RBO, Denis Drolet), qui déplore néanmoins qu'on mette souvent tous les humoristes dans le même bateau. «À partir du moment où on respecte ce métier, on évite les généralisations», croit-il.

«Il y a une réaction nette et rapide des humoristes quand ils se font critiquer, pense toutefois Marc Cassivi, chroniqueur à La Presse. Jamais des artistes ne critiquent ce qu'on dit ou écrit... sauf les humoristes qui utilisent rapidement toutes les tribunes possibles pour répliquer. Je vois là une immaturité d'un milieu qui pratique un art reconnu. Pour faire avancer l'art, il faut être capable d'accepter la critique lorsqu'on fait un métier public, au même titre qu'un chanteur ou un acteur.»

Étonnamment, l'humoriste Mike Ward a abondé dans le sens du critique! «C'est vrai qu'on prend mal la critique. Mais c'est un moyen de défense normal, comme critiquer est ce que je fais dans mon métier.» On s'en doute, au final, beaucoup de pistes ont été lancées, mais tout est resté en plan, rien n'a été réglé. Outre peut-être quelques comptes entre critiques et artistes... Le débat aura au moins permis de se parler dans le blanc des yeux, au dire de Louise Richer, à qui l'on doit la mise sur pied du colloque qui se poursuit aujourd'hui, au complexe des sciences Pierre-Dansereau de l'UQAM.