Lorsque Jesse Lacey a entonné OK I Believe You, But My Tommy Gun Don't sur la scène de la Montagne, une vaste portion de la foule en connaissait parfaitement les paroles. Les blancs d'oeufs ont monté en neige, inutile de l'ajouter. On ne peut plus prévisible : depuis une douzaine d'années (et non d'oeufs), Brand New est passé maître dans la création de chansons viscérales.

Quatre albums plus tard (Your Favorite Weapon, 2001, Deja Entendu, 2003,  The Devil and God Are Raging Inside Me, 2006, Daisy, 2009), ces mecs de New York trouvent encore preneurs. Chants incandescents, détachement de guitares costaudes, basses bien rondes, profusion de batterie et percussions.

Chemise à carreau non sans rappeler l'ère grunge, air grave derrière sa barbe, épaules larges, dos légèrement courbé, Jesse Lacey incarne le malabar hypersensible. Le type triste de quitter l'autre, le type dévasté parce qu'on l'a quitté, le type heurté par tous les irritants de l'existence, le type éclopé de l'intimité. Et, pour faire sortir le méchant, il en fait des chansons comme c'est le cas de son collègue Vincent Accardi, chef guitariste de Brand New.

Les mecs étaient hardcore-punk dans les années 90, ils ont adouci leurs propositions au cours de la décennie suivante. Mises en situation moins rugueuses, mélodies moins gueulées, mieux chantées. Ce qui n'exclut pas les rasades de distorsion dans les chorus, les ponts et les finales. Chassez le naturel.... Cela n'est pas non plus étranger aux Soundgarden et autres Alice in Chains d'une époque de plus en plus lointaine. Encore et toujours, les sentiments authentiques, les accords embrasés, les rythmes binaires bien baraqués et les airs sortis des tripes accrochent quiconque atterrit (ou s'écrase) sur la planète rock.

Admettons que ça frappe dans le mille.

Dans un autre ordre d'idées, accordons une mention spéciale au tandem danois The Raveonettes (Sune Rose Wagner et Sharin Foo) qui a fait très court mais très bon, plus tôt sur la scène Verte. Voilà de beaux esthètes, traversés par les guitares de Sonic Youth et autres visionnaires de même acabit. Néanmoins, ces locuteurs sont bien assez rock pour faire oublier leurs préoccupations formelles à leurs récepteurs immédiats.