Pour les Nord-Américains que nous sommes, le Sahara fascine. Pour son histoire, ses mythes, ses rites, ses luttes politiques et religieuses, pour sa dialectique très spéciale entre tradition et modernité. Pour sa musique, bien sûr. Sans cet enrobage, sans cette somme d'informations entourant sa présentation sur scène, on serait peut-être moins fascinés... Or, nous le sommes devant cette Caravane pour la paix, version réduite d'un Festival au désert mis en attente depuis que le nord du Mali souffre d'un violent conflit armé.

En 2013, il demeure excitant de remonter aux sources du blues et du rock, cela justifie l'intérêt qu'a un certain public à faire le parcours. Ainsi, le parterre de La Tulipe était bien rempli ce mercredi, une caravane de trois formations y avait établi son campement. Gracieuseté des Nuits d'Afrique, on pouvait se visualiser dans le grand désert africain.

Dans un premier temps, on découvre le folklore touareg au féminin. Assises en arc de cercle, des femmes chantent des airs d'une simplicité désarmante, produisent des rythmes aussi très simples, pendant que des instruments à cordes complètent le tableau sonore. Vêtues de leurs plus beaux atours, elles chantent sous la gouverne tranquille de Fadimata Walett Oumar. Cette dernière nous explique le pourquoi et le comment de ces chants traditionnels, ce qui nourrit l'imaginaire à souhait.

Imharhan, deuxième chapitre au programme, se rapproche beaucoup plus de ce blues-rock du désert qui nous intéresse depuis la découverte des Tinariwen, Terakaft, Etran Finatawa et, plus récemment Bombino. En fait, ce sont plus ou moins les mêmes chants émis par Tartit, mais cette fois avec une instrumentation électrifiée. Les guitares modernisent l'approche touarègue, en accentuent la puissance rythmique tout en en maintenant le patrimoine mélodique. Guitare en bandoulière, Mohamed Issa est le musicien central de cette formation qui se veut une variation moderne de Tartit et dont participent plusieurs personnes - quatre femmes et quatre hommes. On acquiert alors la conviction que la voie vers l'égalité des rapports hommes/femmes dans le Sahara est mieux aménagée qu'on pourrait le croire.

Pour coiffer le tout, on s'éloigne très légèrement vers le sud du désert, là où les Peuhls et les Bambaras prennent le dessus de l'expression musicale malienne. Maître du jeu, le guitariste et chanteur Mamadou Kelly fut proche collaborateur de feu Ali Farka Touré, natif de Tombouctou et transplanté dans un village du Mali central. On observe alors que les rythmes peuhls et bambaras sont plus relevés que ceux des formations précédentes. Les jeux harmoniques (guitare et n'goni) et les parcours mélodiques le sont également, bien qu'on se sente dans cette zone de transition entre le Sahara et l'Afrique noire.

Super sensation, d'ailleurs. À l'instar des Touaregs venus s'esbaudir sur scène avec le quartette malien, le parterre de La Tulipe se remplit de danseurs galvanisés par le groove subsaharien. On appelle ça l'exotisme...