Installés dans le très sympa quartier Roma de la mégapole mexicaine, Malitzin Cortés, alias CNDSD, et son complice Iván Abreu sont parmi les artistes pionniers latino-américains de la programmation en direct.

Cet art encore vert a pour objet d'exploiter le langage numérique en temps réel et d'ainsi produire devant public une performance audiovisuelle cohésive et séduisante, incluant une part importante d'improvisation.

Voilà ce dont il sera question ce soir au Monument-National. Et voilà ce dont il a été question il y a quelques jours à peine, soit dans le studio de ce couple brillant, courtois et accueillant.

«Comme je suis architecte de formation, amorce Malitzin, j'ai d'abord utilisé des logiciels de design pour ensuite les associer à d'autres logiciels tels SuperCollider et TidalCycles, qui sont des langages de programmation pour la synthèse audio en temps réel et la composition algorithmique.»

«Le "live coding", je dois dire, est une approche super mathématique, mais qui me permet de programmer en temps réel des sonorités à la fois complexes et intéressantes.»

L'approche de Malitzin s'est étoffée au fil du temps, tant et si bien qu'elle est devenue une référence en matière de programmation sonore en direct, sans compter l'animation 3D ou d'autres pratiques audiovisuelles dernier cri.

Côté sons, CNDSD est férue de musique classique indienne, de chant choral, mais aussi de diverses tendances électroniques (jungle, drum & bass, breakbeat, etc.) et de drone bruitiste. Vaste!

«Musicalement, l'influence prédominante est indienne, car la musique classique indienne offre la plus grande complexité rythmique de toutes les musiques classiques du monde. Par ailleurs, mon approche musicale n'est pas dissociée de mon côté visuel, vu mon background d'architecte, ce qui favorise grandement ma relation créative avec Iván.»

Démarche poussée

Designer et ingénieur informatique, l'artiste cubain (expatrié au Mexique depuis deux décennies) crée pour sa part des sculptures et d'imposantes installations sonores, en plus de mener une démarche électronique très poussée.

«Je travaille régulièrement dans le monde des musées et des symposiums d'art, mais ce travail d'équipe avec Malitzin me permet de me connecter avec un auditoire, ce que j'apprécie vraiment.»

«Elle crée toutes les musiques de notre performance et je m'organise pour lier la dimension visuelle avec d'autres procédés informatiques qui me donnent la possibilité de réagir illico aux propositions sonores», explique Iván Abreu.

Plus précisément, la relation entre l'informatique et l'approche audiovisuelle produit chez ce tandem une approche extrêmement diversifiée, où le rythme se trouve à l'avant-plan.

«Cet amalgame de son et d'images, souligne-t-il, dépasse parfois les capacités de la plus fine motricité humaine. Cela dit, nous ne travaillons pas d'un point de vue strictement conceptuel; notre travail n'est pas froid, il se veut d'abord au service de l'émotion et n'exclut pas des références historiques connues.»

Dans le contexte de MUTEK Montréal, le tandem compte ainsi suggérer de multiples scénarios créatifs de la programmation «à la volée», c'est-à-dire s'inscrivant ici et maintenant dans un contexte d'improvisation.

Ainsi, les formes sonores et visuelles établissent devant nous une relation synesthésique, rappelant ce phénomène neurologique via lequel plusieurs sens sont intrinsèquement liés.

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Au Studio Hydro-Québec du Monument-National, ce soir, dans le cadre de MUTEK, à compter de 20 h.