Après avoir célébré ses 25 ans sur scène l'an dernier, Blue Rodeo repart de plus belle avec l'album In Our Nature, qu'il nous livrera d'un trait demain soir. Conversation avec l'un des deux piliers de ce grand groupe canadien, Jim Cuddy.

La tournée du 25e anniversaire de Blue Rodeo aura permis au groupe torontois de jeter un regard dans le rétroviseur, ce qu'il n'a pas fait souvent. Tout de suite après, les sept musiciens ont terminé l'enregistrement de l'album In Our Nature à la ferme du guitariste et chanteur Greg Keelor.

«Chez Greg, on jouait comme on le fait sur scène et ça nous a donné une idée, raconte Jim Cuddy. Greg dit souvent qu'on devrait faire un show divisé en deux segments dont le premier serait constitué de notre nouveau disque. C'est audacieux et on ne l'a jamais fait... même si je déteste quand les groupes que je vais voir en concert font ça», ajoute en riant l'autre guitariste et chanteur du groupe.

Je lui suggère que cette façon de procéder prouve que le groupe croit beaucoup aux chansons d'In Our Nature, un album un peu plus Rodeo que Blue. Cuddy acquiesce, mais il ajoute: «Rendus là où l'on en est, on ne pourrait refaire le show qu'on a déjà donné. Cette fois, il faut mettre de l'avant notre présent et notre avenir. Alors, plutôt que de mêler nos nouvelles chansons aux plus connues, pourquoi ne pas leur consacrer un segment?

«Ce qui est le plus enrichissant à un concert, c'est quand on en retire quelque chose qu'on n'attendait pas. Je vais souvent voir Bruce Springsteen, dont je suis un grand fan, et j'attends chaque fois qu'il me dise pourquoi je suis ici à ce moment précis et qu'on puisse communier tous ensemble. Je pense que c'est ce qu'on doit viser avec notre public.»

Un concert plus théâtral

La tournée anniversaire a également permis à Blue Rodeo de constater que les nouvelles conditions de sonorisation dans lesquelles il se produit permettent à l'ami Keelor de jouer toute la soirée malgré ses problèmes auditifs. Cuddy souligne un autre élément négligé: l'apport au plan des harmonies vocales du guitariste Colin Cripps, qui prend les solos électriques à la place de Keelor.

«Cette fois, le show est beaucoup plus théâtral: les éclairages, le son, ce qu'on fait sur scène, tout est beaucoup mieux coordonné. On peut se permettre d'être plus artistiques parce qu'on sait que tout est en place au plan mécanique.»

Cuddy se réjouit également que son fils Devin et son groupe fassent la première partie de tous les spectacles de cette tournée canadienne: «C'est bien de les voir s'acclimater aux salles et aux publics où la bière coule à flots. Ils font très bien ça.»

Incidemment, les Cuddy père et fils ont appris en même temps que Blue Rodeo était finaliste pour le Juno du meilleur groupe et que l'album de Devin était nommé parmi les meilleurs albums roots de l'année.

Blue Rodeo est un habitué du gala des Juno, mais il reste méconnu aux États-Unis. Que l'un des grands groupes canadiens du dernier quart de siècle, un groupe soudé dont les deux leaders se complètent si bien et qui joue magnifiquement une musique aux racines profondément nord-américaines, n'ait pas vraiment percé au sud de la frontière dépasse l'entendement.

«Ce n'est pas faute d'avoir essayé, rappelle Jim Cuddy, un sourire dans la voix. On n'est pas faciles à décrire, il faut venir nous voir pour piger. Et puis, il y a quelque chose de très canadien dans notre groupe, pas seulement canadien-anglais, mais également canadien-français. Un peu comme Harmonium, on aime mélanger les genres: eux, c'était le folk et le rock; pour nous, c'est le country et le jazz. Mais on dirait que le fait d'avoir deux chanteurs très différents contribue à la confusion aux États-Unis: my God, c'est qui donc, le chanteur de ce groupe?»

À Wilfrid-Pelletier dimanche soir, 20h. Première partie: The Devin Cuddy Band.