Avec sa présence et son attitude uniques, le trio Sinatra, Martin et Davis avait changé la notion même de ce que devait être un entertainer. Retour dans le temps.

Dans le film Ocean's 11, les personnages joués par Frank Sinatra, Dean Martin et Sammy Davis Jr., d'anciens compagnons d'armes de la Seconde Guerre mondiale, dévalisent cinq casinos de Las Vegas dans la nuit du jour de l'An de 1960.

Dans la vie, Sinatra, Martin et Davis, compagnons de bouteille et de rumba, donnent deux ou trois spectacles par soir dans un de ces casinos, le Sands, puis partent virer Vegas à l'envers jusqu'au matin. En compagnie de bonzes de la mafia qui ramassent la facture et de gonzesses que rien n'oppose à la nuit.

Au noyau dur du trio, il faut ajouter le stand up comic juif Joey Bishop et le Britannique Peter Lawford, le beau-frère du président John F. Kennedy. Frank Sinatra, le leader du groupe, appelait ces spectacles The Summit - en référence au sommet de Paris qui avait réuni Eisenhower, Khroushtchev et de Gaulle en mai 1960.

Mais, pour le reste du monde, Sinatra et ses amis étaient simplement le Rat Pack. Et cette «bande de rats», formée de fils d'immigrants partis de rien, a complètement changé la face du show-business américain.

«Deux Italiens, un Juif et un Noir converti au judaïsme : dans l'humour ethnique, le Rat Pack ne manquait pas de matière», lance Didier Morissonneau, producteur chez Spectra, qui s'est retrouvé sur cette piste à Londres où il était allé voir ce qui se faisait dans le genre «spectacle-hommage». «J'ai vu The Rat Pack Live From Las Vegas dans le West End et j'ai été renversé par la musique et l'ambiance du show. De là, je me suis retrouvé à Vegas où l'hommage The Rat Pack is Back est à l'affiche depuis 12 ans.»

Samedi soir, dans le cadre du festival Montréal en lumière, les spectateurs du Théâtre Maisonneuve entendront les mêmes chansons que ceux du Sands en 1960 : Frank (Brian Duprey) va chanter My Way, comme d'habitude, Dino (Drew Anthony) va entraîner la foule avec Volare et Sammy (Kyle Diamond), l'ancien danseur, va faire revivre Mr Bojangles. Quant à Mickey Joseph dans la peau de Joey Bishop - de son vrai nom Joseph Abraham Gottlieb (1918-2007) -, il va faire les mêmes blagues. «Oui, les mêmes blagues de Polonais et de Juifs», sourit Morissonneau, en soulignant que le spectacle est une reconstitution fidèle des Summits du temps, tant dans l'humour et les chansons que les arrangements musicaux du big band qui accompagne le Rat Pack, ici 12 musiciens de Québec.

Bêtes de party

Les gars du Rat Pack buvaient sec; on a dit que Dean Martin de son vrai nom Dino Paul Crocetti (1917-1995) n'a jamais fait un show à jeun de sa vie. Ils étaient aussi hyper-macho, d'un genre qu'on ne voit plus aujourd'hui «parce que ça ne passerait pas», ajoute Didier Morissonneau. Ils pouvaient se montrer arrogants, mais ils étaient surtout de fabuleux entertainers. Sinatra (1915-1998), le premier teen idol de l'histoire, s'est recyclé dans le monde adulte avant de devenir le premier véritable jetsetter de Hollywood; on l'appelait «the Chairman of the Board»... Dean Martin, lui, faisait fondre ses admiratrices d'un sourire et les hommes s'identifiaient à cette bête de party qui fumait parfois des cigarettes «avec rien d'écrit dessus»...

Quant à Sammy Davis Jr. (1925-1990), il était tombé dedans quand il était petit et il savait se montrer d'une incomparable drôlerie. Quel est votre handicap? lui a-t-on demandé un jour, dans un tournoi de golf de célébrités. «Mon handicap? Je suis un Juif noir de Porto Rico qui a juste un oeil...»

The Rat Pack is Back, au Théâtre Maisonneuve, samedi soir, à 20h.