Dialogue entre une trapéziste et un pianiste, réflexion sur le vieillissement, le spectacle Miroir, Miroir, de la troupe Happés Théâtre Vertical, s'installera mardi dans la salle de répétition d'Espace Go. Trente minutes de poésie et d'émotion pour un public prêt à être confronté à son rapport à l'image... et à son propre reflet.

Miroir, Miroir a charmé le public du Festival d'Avignon il y a deux ans, où il ne devait être joué que pour quelques représentations: la trapéziste Mélissa Van Vépy et le pianiste Stephan Oliva le promènent sans arrêt depuis. Mais pour ses premiers pas en sol montréalais, la jeune artiste franco-suisse est un peu inquiète. «Dans la ville d'origine du Cirque du Soleil, je ne sais pas comment je serai reçue, car je suis davantage dans la danse et le théâtre que dans la performance.»

N'empêche que performance il y a: le trapèze de Mélissa Van Vépy est monté sur un miroir et sa manipulation demande beaucoup de force et d'habileté. «Je suis très investie, admet-elle, mais mon but est que ça ne paraisse pas que c'est difficile...» De formation circassienne, Mélissa Ven Vépy est une trapéziste de haut niveau qui a vite eu envie de dépasser la technique de base de son agrès. «Mon moyen d'expression reste vertical, mais je voulais aller vers des spectacles auxquels les gens pouvaient s'identifier, entre autres avec des objets du quotidien.»

Le miroir en est justement un, et le personnage central incarné par la trapéziste cherche à le traverser. «Nous avons tous des moments dans notre vie où on se voit de manière objective, et cette femme s'inquiète de ce qu'elle peut déceler au-delà du miroir. Il est question de ce qu'on voit, des apparences, et de ce qu'il y a derrière.»

La Alice de Lewis Carroll n'est pas loin, convient-elle. «Oui, ça fait partie de l'imaginaire collectif. Je le revendique, mais je n'ai pas besoin de ça: je travaille plus dans le ressenti, de manière simple et directe. Je n'intellectualise pas mon propos.»

Comme la représentation se déroule dans un espace très restreint, les spectateurs sont nécessairement confrontés à leur propre image, qui se reflète dans le trapèze de Mélissa Van Vépy.

«Ce n'est plus juste une femme face à son âge, puisque tout le monde se voit et voit les autres spectateurs. Ils sont nécessairement interpellés, concernés.» La proximité fait aussi en sorte qu'on voit de très près le travail de l'artiste, qu'on entend son souffle, qu'on voit son visage. «Ça rend le spectacle moins esthétisant, et ça donne davantage la possibilité aux spectateurs de rentrer dedans.»

Mélissa Van Vépy aime peu parler de Miroir, Miroir, par peur de l'enfermer dans des phrases et des concepts, mais on comprend que ce spectacle n'est pas un moment de franche rigolade. «Ce n'est pas drôle du tout! dit-elle en riant. «Je parle moins de l'obsession de l'image que du souci du vieillissement, du temps qui passe et de ce qui nous attend au bout, dans l'au-delà.»

Un spectacle assez grave donc, «plus poétique que ludique» qui évite la lourdeur par l'ingéniosité de son installation, la grâce aérienne de l'interprète et la musique de Stéphan Oliva, qui improvise chaque soir et avec lequel elle entretient un véritable dialogue. Et pourquoi pas, finalement? «J'aime mieux parler de ce qui m'importe profondément.»

Miroir, Miroir, du 12 au 16 juillet à Espace GO.