Ils n'ont pas d'histoire à raconter. Pas de personnage. Pas de message à passer. Et aucune affinité avec le théâtre. Ce sont des artistes de cirque brut. Ou des artistes bruts de cirque. Ou des brutes tout court, comme vous voudrez, mais ils ne font pas dans la dentelle. En même temps, ce sont de véritables circassiens. Et, il faut bien l'admettre, ils ont le sens du spectacle.

Petit mal est une proposition finalement assez étonnante, où il y a, bien sûr, des appareils de cirque classiques, comme un trampoline et un mât chinois, mais où aucun numéro ne peut être qualifié de classique. À ces agrès de cirque, s'ajoute une foule d'accessoires, comme ces pneus de voiture qui jonchent le sol de la scène, et qui servent à créer plusieurs de ces numéros insolites présentés dans le désordre. Sur fond de musiques folk-rock.

Il faut vous dire que les trois interprètes finlandais de Race Horse Company n'ont aucun égard l'un pour l'autre. On est loin des câlins que se font les artistes des 7 doigts... Non, ils ne font absolument rien pour s'aider. Au contraire. Pendant le numéro de mât chinois de l'un d'eux, un collègue sectionne un câble... Ou alors pendant que l'un rebondit sur un ballon, l'autre le perce d'un coup de lance, faisant s'écrouler le premier.

Et ils se font mal

Et c'est comme ça pendant tout le spectacle. Ils se poussent, ils se lancent, ils se provoquent. Et ils se font mal. À la manière de trois chats de ruelles. Comme eux d'ailleurs, ils rebondissent toujours sur leurs pattes. Car ils sont habiles. Soulignons notamment les figures exceptionnelles de Rauli Kosonen sur le trampoline; les manoeuvres téméraires de Petri Tuominen au mât chinois; le numéro de breakdance de Kalle Lehto, qui joue aussi le rôle de vilain du début à la fin.

Ce parti-pris du non-spectacle où l'on nous gave de performances a tout de même ses limites. Oui, les numéros nous gardent en éveil, certains même sont carrément épatants, comme ce numéro collectif avec des ballons géants. Mais il y a une certaine lassitude à voir ces jeux de luttes acrobatiques. Il y a aussi une certaine froideur dans le rapport des artistes avec le public, qui nous garde à distance.

Cela dit, l'approche de Petit mal, mis en scène par le fondateur de Circo Aereo, Maksim Komaro, est tellement originale, audacieuse et déstabilisante, qu'elle vaut certainement le détour. Vous en aurez des bleus après, rien qu'à y penser.

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Jusqu'à dimanche au Théâtre Outremont.