En soussou (langue de la Guinée), Kalabanté signifie «enfant fonceur» ou encore, comme l'extrapole le créateur Yamoussa Bangoura, «quelqu'un qui va en avant de ses amis pour les amener à faire quelque chose de bien, de positif».

Ancien du Cirque Éloize, Yamoussa Bangoura a créé les productions Kalabanté avec une dizaine de collègues haïtiens, centrafricains, burkinabés. Devant un smoothie aux fraises, dans un Tim Hortons aux teintes multiculturelles en plein coeur de Parc-Extension, Bangoura explique comment ses pairs et lui transcendent, dans Kô Ryass - production qui prendra naissance à Montréal complètement cirque -, la force de la spiritualité, de la nature, des croyances, de l'amour, de la pensée.

«Je me suis dit que tout ça décrivait bien ce qu'on est», dit le directeur artistique, spécialiste des sangles aériennes, acrobate, danseur traditionnel et contemporain, qui maîtrise aussi le balafon, les percussions et le chant traditionnel.

L'artiste multidisciplinaire a conçu un spectacle alliant trapèze, acrobaties au sol et autres variations sur le thème de l'art circassien. «Tous les numéros sont inspirés de la Guinée, dit-il. Quand on voit la danse des trois eaux par exemple, on trouve une danse de liberté qui nous invite à nous débarrasser du poids de la vie.»

Le jour de notre entretien, il faisait une chaleur tropicale et Yamoussa Bangoura s'apprêtait à aller retrouver ses copains de Kalabanté dans le parc Jarry - la compagnie répétait aussi pour une performance donnée dans le cadre de Cavalia.

D'abord autodidacte, Bangoura s'est initié à son art en regardant les retransmissions de cirques européens qui étaient diffusées les dimanches. «Avec des amis, on pratiquait en cachette. On allait au bord de la mer, pour imiter les numéros», confie-t-il.

Sa propre école

De nature paisible et sereine, Bangoura promène son âme nomade partout dans le monde et pose ses valises par intermittence à Montréal, où il a élu domicile il y a quelques années. Chouette coïncidence: Kô Ryass sera joué au Studio B de l'édifice Guy-Gagnon à Verdun, là où Bangoura a échoué, quelques heures après son atterrissage à Montréal.

«Quand je suis arrivé ici et que j'ai vu ce que faisait le Cirque Éloize et le Cirque du Soleil, je me suis dit que je pourrais apporter un côté dévotionnel à cet art», relate l'artiste formé dans sa Guinée natale, où il a fondé sa propre école à 20 minutes de Conakry, en pleine forêt. Là-bas, ses parents et des amis guinéens gèrent l'école qui a terminé la première partie de sa construction.

«J'ai des amis d'ici qui vont là-bas pour y donner des cours. Et Art'Cirq y a passé trois semaines. Nous aussi sommes allés chez eux dans le Grand Nord, à Igluliq. Nous avons tellement de similarités avec eux: leur façon de se tourner vers la communauté et leur respect pour les vieux», relate celui qui prône l'unité dans la diversité.

«Il faut apprendre des choses. Tout le monde vient dans ce monde avec des forces différentes», observe ce spécialiste de l'acrobatie au sol, qui fréquente les tam-tam sur le mont Royal les dimanches.

Dans un numéro intitulé «La fête au village», la bande de Kô Ryass invitera ainsi les membres du public à prendre part à la danse.

«On y explique que chaque village a son guerrier, qui l'accompagne et lui donne la force de combattre les esprits», exprime Yamoussa Bangoura, qui décrit avec beaucoup de tendresse son pays natal, où il retourne au moins deux fois par année.

Il aime que le festival Montréal complètement cirque interprète de manière différente les cultures du monde entier. «Ça rend le festival riche. Dans le monde du cirque, deux personnes peuvent jongler ensemble, sans parler la même langue.»

Kô Ryass, productions Kalabanté, au Studio B (édifice Guy-Gagnon), dans le cadre du festival Montréal complètement cirque, demain et samedi à 20h et dimanche à 15h.