Ce duo allemand fait tourner The Best, comédie de masques et de mimes, depuis 1986. Mais c'est la première visite en Amérique du Nord de Hartmut Ehrenfeld et Michael Aufenfehn, mieux connus sous leurs noms de scène : Habbe & Meik, des clowns savants aux visages multiples.

«Imaginez Charlie Chaplin, Laurel et Hardy et Buster Keaton, réunis avec Astérix et Obélix, imaginez que cette mixture apparaisse devant vous, non derrière vous, parce qu'on veut vous surprendre. Voilà un peu qui nous sommes», commence par nous dire Michael Aufenfehn en guise de présentation.

Difficile de suivre ce comique allumé, qui parle à la fois de la politique allemande, de la faillite de notre système démocratique, du travail de clown et de l'essence du théâtre et de son sous-financement. En tout cas, sa recherche d'une esthétique théâtrale l'a mené à privilégier le jeu masqué, sans parole.

«Le masque est le plus vieil instrument de l'homme, nous dit Michael Aufenfehn. Il relève du chamanisme. Il fait qu'on peut être autant un animal qu'un élément de la nature. C'est pour nous une façon de montrer une émotion très simplement, mais en la grossissant, en l'amplifiant.»

Les personnages de Habbe&Meik sont donc nés au début des années 80 au détour d'une rencontre fortuite entre deux étudiants. Au fil des ans, les deux comiques ont construit tout un univers pour leurs personnages masqués. Les saynètes changent d'une année à l'autre, puisque l'actualité évolue tout le temps.

«Ce sont des personnages contradictoires. Le positif et le négatif, le blanc et le noir, le constructif et le destructif. Ils se battent tout le temps. C'est leur combat dans la société que nous racontons. Et comme ces combats ne sont pas les mêmes d'une période à une autre, nos sketches changent aussi», indique Meik.

Les deux mimes, inspirés par les plus grands duos comiques comme Laurel et Hardy, communiquent donc avec leurs corps et leurs masques. «Les masques montrent beaucoup d'émotions. Ils sont très expressifs. Ce qui est intéressant, c'est lorsque par exemple votre corps joue sur le côté positif et le masque sur le négatif. Ou vice-versa. Ça crée des tensions intéressantes.»

La réflexion de Habbe&Meik sur la vie de clown n'est pas banale. En effet, qu'est-ce qui fait le succès d'un clown-mime?

«Imaginez un clown qui arrive sur scène avec deux kilos de bananes, nous dit Meik. Il ouvre une banane et la mange, mais personne ne rit. Il n'y a rien de drôle. Il en mange une deuxième, et c'est pareil, personne ne rit. Mais rendu à la 15e banane, les gens vont commencer à rire. Quand on souffre sur scène, les gens rient. Le malheur et l'infortune des uns font toujours rire les autres...»

Mais point de bananes il y a dans The Best. Non, Habbe&Meik sont quand même plus subtils. Par exemple, dans une scène, un homme veut se coucher dans son lit, mais son duvet se met à bouger, l'empêchant de réaliser ses désirs. Ou encore deux enfants font connaissance, puis se disputent. Le premier veut frapper le second, qui panique et fait pipi dans le seau du premier...

En 25 ans de travail, Habbe&Meik n'ont-ils jamais réalisé d'autres projets? «Nous avons eu d'autres projets, mais on revient toujours à Habbe&Meik. Nous sommes comme des frères. Et puis c'est le public qui nous donne l'énergie ou non, tout dépend des soirs. A-t-il eu une bonne ou une mauvaise journée? Dans un sens, chaque spectacle est une performance unique.»

The Best de Habbe & Meik, du 20 au 22 juillet à Espace Go.