Acteur de théâtre. Pas humoriste. François-Xavier Demaison est d'abord et avant tout un acteur, un grand acteur qui, pendant une heure, avec son seul costume deux-pièces noir, joue et crée sur scène des personnages qui semblent naître devant nous. Un prisonnier dont on voit les rayures, un masseur gai avec sa bouteille d'huile, un grand-père meurtri par l'arthrite, un courtisan maniéré à la cour de Versailles ou un castor québécois perdu dans la forêt...

Raffiné, FX Demaison a ravi le public de la Cinquième salle de la Place des Arts, hier soir. Cet artiste français, que les cinéphiles ont peut-être découvert il y a deux ans dans le rôle de Coluche, joue et prend du plaisir à jouer, à se déguiser, à se vieillir ou à s'infantiliser pour nous parler du couple, de la crise ou de ce monde qui change.

Et on y croit autant quand il fait le grand-père se déplaçant avec sa marchette, le gynécologue italien qui «fait du thé russe» ou le maître de ballet du roi Soleil, imitant la préciosité des courtisans de sa cour.

«C'est ça qui m'a donné envie de monter sur scène», glisse-t-il quand il prend une pause entre ses joutes oratoires.

Histoire d'horreur pour enfants

Quand il raconte l'histoire de Bitou, petit castor québécois qui se perd en rentrant de l'école, il faut l'entendre déformer sa voix pour jouer l'animal autant que le bûcheron tueur en série. Les enfants (et les plus grands) de la salle étaient pliés en deux à l'écoute de cette histoire un peu horrible... qu'il dit raconter à sa fille: «Elle n'a pas dormi depuis six mois, dit-il. Elle a 5 ans et elle en fait 38!» Puis, tout à coup, on allume les lumières de la salle et il se met à faire une visite du théâtre, passant entre deux rangées de spectateurs et racontant les souvenirs d'un directeur de théâtre homosexuel. Savoureux.

Ensuite, il mime un président d'entreprise tricheur et égoïste qui joue au golf pendant que ses employés font la grève de la faim dans son bureau.

Un boss qui profite de sa mère Alzheimer pour fêter trois fois Noël avec elle afin de la tromper... et qui déclare: «Même la Grèce va changer de nom tellement elle a maigri» ou «C'est bizarre que les Américains aient eu tant de problèmes de logement et qu'ils élisent un président qui s'appelle Barack!» Quand il joue le sommelier d'un restaurant français à l'accent chantant, FX a du Raimu, du Galabru, du Yves Montand dans les gestes et dans la parole, une parole qu'on boirait jusqu'à plus soif.

«Quand je suis acteur, je peux tout faire, être qui je veux... je suis libre!», dira-t-il en conclusion de cet excellent spectacle.

Libre FX, oui, mais aussi talentueux et attachant. Un acteur qui magnifie l'humour.

___________________________________________________________________________

Demaison s'évade. Ce soir et demain. Cinquième salle de la Place des Arts.