À mi-parcours, le Festival TransAmériques n'a pas encore offert de grande découverte ni de gros coup de coeur aux festivaliers. Jeudi soir, la compagnie australienne Back to Back Theatre a présenté Ganesh Versus the Third Reich. Ce spectacle traite à la fois du processus de création, de l'appropriation culturelle et de la tyrannie du pouvoir. L'oeuvre soulève d'intéressantes pistes de réflexion, mais elle n'a rien de transcendante tant dans sa forme que son propos.

Comme son titre l'indique, la prémisse dresse un parallèle entre le régime nazi et la divinité hindoue à tête d'éléphant, Ganesh. Celui-ci veut récupérer le svastika des mains d'Hitler, car le Führer en aurait détourné le sens pour en faire le symbole du nazisme. En plus de cette opposition entre le bien et le mal, la sagesse et la dictature, le spectacle offre une seconde couche narrative en présentant les acteurs en répétitions qui s'interrogent  sur la pertinence de leur pièce en chantier.

Si ce genre de théâtre dans le théâtre n'a rien de nouveau, il le devient un peu plus lorsqu'on découvre que les interprètes (Mark Deans, Simon Laherty, Scott Price et Brian Tilley) sont tous des handicapés intellectuels jouant leur propre rôle, sauf Luke Ryan qui incarne leur metteur en scène.

Ce dernier, malgré son empathie pour le groupe, semble se complaire dans un narcissisme puéril en exposant constamment son corps athlétique (il est en short et torse nu la moitié du temps) qui tranche avec le physique atypique de ses partenaires de scène. Peu à peu, le metteur en scène va devenir autoritaire avant de se transformer en véritable despote vers la fin, dans une scène à la limite du soutenable. Lorsque qu'un interprète devient un juif persécuté, le sens n'en est que plus fort: l'acteur symbolise la différence face à l'idéologie nazie de supériorité aryenne.

Trop de questions

Il y a beaucoup de questions (et de sous questions) dans cette proposition conçue par Bruce Galdwin. En plus de s'interroger sur leur démarche artistique, la troupe prend à partie le voyeurisme du public en lui demandant s'il s'attendait à voir «un aquarium, un zoo, un freak show» en assistant à une pièce mettrant en vedettes des handicapés? Une tentative de briser le quatrième mur qui tombe à plat: les amateurs du festival de Marie-Hélène Falcon sont tout... sauf des voyeurs.

Au lieu de ça, Gladwin et sa troupe auraient pu travailler davantage la mise en en scène ponctuée de temps morts (on tire constamment sur d'immenses rideaux qui ressemblent à des rideaux de douche). Les meilleures images de cette création sont formées d'ombres chinoises... ce qui, en 2013, ne constitue pas vraiment une révolution esthétique. On sent aussi beaucoup trop l'improvisation à la base de l'écriture de la pièce. Il manque une vision globale, un souffle, du liant, qui aurait donné à l'oeuvre une véritable charge émotive et dramatique.

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Les 30 mai à 20h et 1er et 2 juin à 16h, à l'Usine C, dans le cadre du FTA.