La chorégraphe montréalaise Mélanie Demers n'a cesse de nous confronter à notre léthargie face aux affres du monde. Goodbye, sa nouvelle création, présentée au FTA, creuse ce sillon. Mais, cette fois, l'indignation de celle qui se nourrit aussi à l'action sociale se fait plus sourde.

Délaissant l'accumulation de détritus et l'esthétique baroque du précédent Junkyard/Paradis, Mélanie Demers renoue avec l'épure. Dans Goodbye, la scénographie tient simplement d'un plancher en échiquier noir et blanc, de chaises et de quelques accessoires employés avec justesse.

Car c'est bien la justesse de Demers qui impressionne. Goodbye se déploie en une suite de méticuleuses variations sur quelques situations choisies: duels entrechoqués, jeu de distanciation où l'on exige des spectateurs qu'ils s'expriment sans leur en laisser la chance, un autre où l'on nous assure sans cesse que le spectacle n'est pas encore commencé, l'interprétation d'Oh! Darling des Beatles et même l'action de donner le sein.

Certes, plusieurs de ces situations, ou procédés, sont déjà très employés en danse contemporaine. C'est peut-être là que le bât blesse dans Goodbye: impression de déjà vu, de rapports convenus. Cela dit, Demers, Brianna Lombardo, Chi Long, Jacques Poulin-Denis déclinent très subtilement chacun de ces leitmotivs. Il s'agit là d'ajouter un accessoire ou un élément maquillage, tantôt de forcer sans préavis l'intonation d'Oh! Darling, ailleurs de substituer un micro pour un couteau ou de tourner d'un cran une chaise pour que la scène vire de bout en bout. Chaque interprète s'y fait tour à tour victime, dominant, maître du jeu ou témoin passif.

L'accumulation, en rigoureuse progression, de séries de séquences fait monter la tension à mesure que Demers nous aiguillonne ainsi. Mais on regrette la charge plus sombre et directe des Angles morts, la rage éclatée de Junkyard/Paradis au profit d'une dénonciation implorante et de chemins plus fréquentés.

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Goodbye de la compagnie Mayday. Les 7 et 8 juin à l'Agora de la danse. Info : fta.qc.ca