Il a suffi d'une chanson pour que la salle Wilfrid-Pelletier sente la complicité d'Alain Souchon et Laurent Voulzy, hier soir. Ils sont apparus tous les deux devant le grand rideau rouge, Voulzy le musicien avec sa guitare, et Souchon le comédien chantant J'ai 10 ans, son premier tube qui, mine de rien, a désormais plus de 40 ans. Une chanson dont la musique a été composée par l'ami Voulzy, ce dont Souchon lui sera éternellement reconnaissant.

Depuis lors, les deux grands copains s'écrivent l'un des textes, l'autre des musiques, qui donnent des chansons curieusement fort différentes l'une de l'autre comme le sont Souchon le tombeur qui parle toujours des filles et Voulzy le danseur dont le répertoire compte plusieurs chansons ensoleillées. Complicité et complémentarité.

Pour la première fois, ces deux-là ont non seulement pondu mais aussi enregistré ensemble un album délicieusement trempé dans la pop-rock britannique au carrefour de McCartney et de Procol Harum. Curieusement, ce n'est qu'après une heure et demie de leur spectacle qu'ils nous en ont offert une seule et unique chanson, Derrière les mots, qui, nous a pourtant dit Souchon, leur a permis d'être avec nous hier soir.

Déception donc pour celui qui a goûté ce délicieux album dans lequel les deux amis ont puisé davantage dans leurs spectacles en France et même à Londres. Mais une très courte déception, tellement fut réjouissant ce spectacle au cours duquel ils ont donné l'impression d'avoir fait la paire sur scène toute leur vie durant.

Réjouissant comme les chansons chaloupées de Voulzy dont Amélie Colbert, inspirée de la Guadeloupe où le monsieur a des racines, une fête musicale à laquelle le public de Wilfrid-Pelletier a participé sans se faire prier, dansant au rythme du solo de batterie. De tout aussi réjouissant il y eut Le bagad de Lann-Bihoué de Souchon, dans laquelle la cornemuse virtuelle se mariait au tambour sur lequel Voulzy battait le rythme derrière.

Le plus beau dans tout ça, c'est que les chansons interprétées par les deux hommes, sans leurs cinq très bons musiciens, avaient autant d'impact avec une simple guitare acoustique qu'une chose aussi riche et théâtrale que ce Bagad. Je pense à la jolie ballade aux accents folk Somerset Maugham dans laquelle ils chantaient en alternance et s'unissaient pour les harmonies.

Parmi les autres grands moments, il faut parler des chansons plus sociales de Souchon, dont C'est déjà ça, pendant laquelle les mains du chanteur dansaient au rythme d'une musique sur laquelle n'aurait pas craché Sting, ainsi que de la chanson coup-de-poing qui l'a précédée, Et si en plus y'a personne, dont le propos pas particulièrement à l'eau de rose n'a rien perdu de sa résonance de nos jours.

Ensemble, Souchon et Voulzy peuvent chanter la guerre et les armes de poing tout autant que le rêve hippie du Pouvoir des fleurs. Le public applaudit autant l'un que l'autre et il chante avec les deux la Foule sentimentale du premier, que Voulzy fait mine de lui chiper, et la Rockcollection de l'autre, plus musclée que sur disque.

Ne reste plus qu'à espérer que si un jour, avant 40 autres années, l'envie leur prend de repartir en tournée ensemble, ils nous offriront d'autres chansons de leur très bel album commun de 2014.

photo benoit rousseau, fournie par les francofolies

Les chansons à teneur sociale d’Alain Souchon font partie des grands moments de ce spectacle des FrancoFolies.