Chanteur populaire dans tous les sens du terme, Bénabar foulera demain, pour la première fois de sa carrière, une scène montréalaise. Il débarque au Métropolis avec tout l'attirail de son plus récent spectacle - section de cuivres, accordéon et costumes -, et avec la promesse de revenir faire une véritable tournée québécoise en 2013.

Bénabar est à peine descendu de l'avion qu'il assure déjà qu'il reviendra. « J'ai plus envie de voyager que de me laisser dépasser par mes peurs. Et puis Dieu a inventé le vin rouge, qui est sûrement le meilleur antidépresseur, dont j'abuse sans culpabilité aucune dans l'avion!» Alors que les Cali et autres Thomas Fersen nous ont très souvent gratifiés de leur présence, Bénabar n'a chanté ici qu'une fois, en 2005, lors du Festival d'été de Québec. «J'avais un emploi du temps chargé, et surtout, j'avais envie d'une vraie présence ici. Ça ne m'intéresse pas de venir ponctuellement.»

Bénabar fait partie de ce qu'on appelle la «nouvelle chanson française», alliant textes bien ciselés souvent drôles et musique pop enjouée. Il connaît un immense succès en France. Récipiendaire du Victoire du disque chanson/variété en 2004 pour Les risques du métier, interprète masculin de l'année en 2007 pour Reprise des négociations, son disque Infréquentable, sorti en 2008, s'est vendu à 500000 exemplaires et a été suivi d'une tournée qui a attiré 800000 spectateurs. Suite logique, les ventes de son sixième et plus récent disque, Les bénéfices du doute, sorti en décembre 2011, vont bon train.

Il pourrait avoir la grosse tête, il se dit plutôt conscient de sa chance. «Je suis privilégié, dit-il, je le sais, et je ne suis pas blasé. C'est pour ça que je donne un vrai spectacle. Je veux que les gens passent du bon temps pendant deux heures.»

Chantre de la classe moyenne - «On m'a souvent traité de bobo. Bourgeois oui, bohémien pas du tout!» -, Bénabar est un vrai «bon gars». Le genre de chic type qui s'affirme sans complexe politiquement correct dans une chanson «coup de gueule» qui s'en prend au «discours nauséabond qui, sous prétexte de lutter contre le politiquement correct, lutte contre l'humanisme. Est-ce qu'un jour on va devoir s'excuser parce qu'on n'est pas misogyne?»

Chanteur sympa donc, qui transforme tout ce qu'il touche en succès. «J'ai fait seulement un film comme acteur, Incognito, une comédie avec Frank Dubosc, et ça a marché. Je comprends qu'à la longue, ça peut énerver!» Surtout de la part d'un homme qui refuse de choisir entre Bashung et Joe Dassin, qui apprécie Gainsbourg autant pour L'homme à la tête de chou que pour L'ami Caouette, qui aime les chansons qu'on peut «siffloter sous la douche» et se dit incapable d'être snob.

La poésie du quotidien

Ses relations sont difficiles avec une certaine presse musicale française, et quelques confrères chanteurs - Benjamin Biolay, pour ne pas le nommer- n'hésitent pas à le critiquer par médias interposés. «Pour certains, je suis une provocation ambulante. On m'attend souvent au détour, mais ça va. Je ne vais pas embêter les gens avec mes problèmes de chanteur», aime-t-il répéter.

Fidèle à lui-même, Bénabar défend ainsi la «variété exigeante» et estime que c'est un défi noble d'y arriver. «Et puis, la posture du chanteur inspiré m'ennuie. On peut l'être, mais on n'est pas obligé de le montrer!»

Lui aime la poésie quotidienne - «Il n'y pas que les bateaux en pleine tempête, il y a aussi les abribus» -, les détails qui disent tout, les petites histoires. «J'ai commencé en écrivant des scénarios, et je reproduis cette structure dans mes chansons. C'est vrai que je laisse peu de place à l'imaginaire, tout est décrit. Pour certains, ça peut être étouffant, moi j'aime cette précision.»

Bénabar se dit fier de cette nouvelle tournée et s'estime plus «affirmé» que jamais dans son choix d'offrir un divertissement de qualité. Une question d'âge peut-être, dit le chanteur qui aura 43 ans la semaine prochaine. «Quand on commence, on a peur que nos copains se foutent de notre gueule. Après, on assume plus.»

Les projets québécois sont pour lui un moyen de prendre du recul et de rencontrer un autre public. Il compte présenter un disque best of à l'automne, incluant un duo avec une chanteuse québécoise (pas encore choisie), et désire fermement explorer le territoire. «Je veux voir le pays de l'intérieur.» Premier contact demain.

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Bénabar au Métropolis demain, à 21h. Première partie: Sophie Beaudet.