Dire que l'an dernier, la tente Slam était une structure de toile montée à la dernière minute sur l'emplacement du défunt Spectrum, direct sur le trou bouché à toute vitesse avant les Francos, angle Sainte-Catherine et Bleury. Cette année, bien franchement, on n'y présente plus de slam. Mais c'est certainement un des endroits les plus courus du festival, un lieu où on se presse en masse parce que la tente se prête particulièrement bien à la chanson et qu'on y découvre une foule de jeunes chanteurs doués, soir après soir.

Jeudi, c'était au tour de Catherine Major et d'Alecka, en jumelé, de séduire, chacune à leur manière, la foule qui se bousculait sous la tente Slam -ça débordait de partout, il y faisait chaud, et pas juste à cause de la température clémente!

Les nombreux spectateurs ont en effet eu droit à un spectacle fascinant, où l'énergie lunaire et l'énergie solaire se succédaient.

La lunaire -plus tourmentée et lyrique, à fleur de peau- c'était Catherine Major. Pendant une demi-heure, accompagnée de trois musiciens attentifs, la jeune femme a fait montre d'une évolution évidente. Oui, c'est une mélodiste exceptionnelle, une pianiste douée et une compositeure de talent, oui, elle a le sens de l'image dans ses textes. Mais jusqu'ici, sur scène, c'était toujours tellement intense qu'on avait parfois l'impression que chacune de ses chansons était la dernière du spectacle. Cette fois, c'était le volcan, mais qui couve. La passion, mais jugulée juste assez pour qu'on en sente justement toute la puissance harnachée. Et à la fin seulement, le déchaînement: quand elle a chanté Le piano ivre, quasi debout, elle a soulevé la foule, qui l'a applaudie à tout rompre. Cette lune-là ne devrait pas connaître d'éclipse!

Alecka, elle, est fille du Soleil, d'une énergie brute peu commune. J'avoue avoir un faible pour cette jeune auteure-compositeure-interprète au verbe dru, à la fougue «in your face», sans détour, et la scène est vraiment son élément. Accompagnée par quatre musiciens solides, Alecka a démontré que la langue de bois n'est pas son truc. Elle est capable de chanter des textes heavy avec une pointe d'espoir ou une chanson féministe comme ça faisait longtemps qu'on n'en avait pas entendue -pertinente, directe, ouverte et s'adressant aux femmes elles-mêmes: sa chanson Cachez-la est un morceau de bravoure qui a séduit totalement la tente Slam. Il faut voir Alecka danser, sentir sa fierté envers ses deux origines (québécoise et libanaise), l'entendre sacrer parce que des fois c'est ça que ça prend, clamer ses textes avec tout son corps, pour comprendre qu'on a là une petite force de la nature. Son disque, nécessairement plus poli et plus inégal, ne donne pas sa pleine mesure (un peu comme Marie-Jo Thério, il y a des années, dont le premier disque n'annonçait tellement pas l'artiste hors norme qu'elle est). Pas grave, on va revoir Alecka sur scène, c'est sûr. Tiens, justement, elle est en spectacle, gratos, samedi, 19h, sur la scène Loto-Québec!

La tente Slam réserve encore d'aussi heureuses surprises demain et samedi, notamment Ariel, Chinatown, Jeanne Rochette et Laurence Hélie.