Le discret Francis Cabrel est de passage au Festival international d'été de Québec où il participe, ce soir, à un spectacle réunissant artistes québécois et français. Mais s'il a fait le voyage, c'est surtout pour accompagner L'enfant-porte, conte musical présenté ce week-end et dont il est l'un des architectes.

Homme posé et soucieux de son intimité au point de vivre depuis toujours en marge du showbizz parisien, Francis Cabrel esquisse un sourire en coin lorsqu'on l'interroge sur sa participation à un concert placé sous le signe de l'amitié entre la France et le Québec. «Je n'ai même pas de liens avec les artistes français, alors...»

Cabrel dit vivre «comme un sauvage», à Astaffort, près du village où il est né. Il y a fait sa vie, y a fondé les Rencontres d'Astaffort (des ateliers d'écriture de chanson) et c'est de cet observatoire qu'il épie les travers du monde ou scrute les mouvements du coeur qu'il sert ensuite en musique.

Des amis québécois? Il en a au moins un: Zachary Richard avec lequel il a écrit La promesse cassée, pour venir en aide à la Louisiane dévastée. Ses affinités avec le Québec dépassent toutefois ses liens avec les créateurs d'ici. Cabrel est l'un des derniers artistes français dont les succès peuvent être considérés comme des classiques des deux côtés de l'Atlantique.

«J'étais fasciné par le Québec, j'ai toujours voulu venir, même si à Paris je sortais de l'Olympia et qu'ici je tombais dans un cabaret, dit le chanteur, dont les premiers concerts chez nous remontent au début des années 80. Je pensais et je pense toujours que, partageant la même langue, on est sensibles aux mêmes émotions, aux mêmes sentiments.»

Un conte musical

S'il est revenu à Québec cet été, c'est moins pour partager l'affiche avec Robert Charlebois, Diane Dufresne, Khaled, Grand Corps Malade ou Patrick Fiori que pour accompagner une création émanant de ses chères Rencontres d'Astaffort: L'enfant-porte, une aventure musicale destinée aux enfants. D'un thème imposé, l'illetrisme, le conteur Yannick Jaulin a imaginé une histoire où des villageois, les Feuns, sont tenus dans l'ignorance par des commerçants sans scrupules.

Partant de ce scénario et des personnages proposés, les «astagiaires» (c'est ainsi qu'on nomme les participants des Rencontres d'Astaffort) ont extrapolé autour des thèmes et des personnages. Il en résulte un conte musical qui, du point de vue d'un adulte, s'avère une critique nette de la manière dont le pouvoir économique traite le savoir et la culture.

La ligne éditoriale est si précise qu'on s'étonne un peu de voir Cabrel, qui a toujours fait preuve de pudeur et de nuance dans ses morceaux à teneur plus sociale, s'investir dans un tel projet. «Il est vrai que, dans mes chansons, j'essaie toujours de laisser une part d'imagination. De laisser deviner, presque, ce que j'ai l'intention de dire, reconnaît-il. Mais avec les enfants, je crois qu'on doit entrer dans une forme d'écriture plus directe, moins métaphorique.»

L'enfant-porte termine son parcours scénique au Québec après une série de dates en France. Avec Cabrel, du moins. Une fois rentré chez lui, il jure qu'il plongera dans l'écriture de son prochain disque. «J'ai pris du retard», constate l'artiste, qui se dit pourtant peu pressé - il produit un album au quatre ou cinq ans. «À partir de la semaine prochaine, j'écris des chansons.»

> Paris-Québec sous les étoiles, 21h sur les plaines d'Abraham

> L'enfant-porte, samedi et dimanche au Palais Montcalm

À voir au Festival d'été

> Demain: Ben Harper, Grand Corps Malade et Stefie Shock

> Samedi: Elton John, un triplé électro hip-hop (Gatineau, Random Recipe et Champiom), Novalima et The Klezmatics.

> Dimanche: The Black Keys sur les plaines, Florence K., Wanda Jackson et Tim Robbins (oui, l'acteur).