Quand il a cofondé l'Orchestre de la Francophonie il y a 10 ans, Jean-Philippe Tremblay était pour ainsi dire un jeunot inconnu du public. Une décennie plus tard, il dirige l'orchestre au Festival de Lanaudière avec Alain Lefèvre au piano dans le 4e Concerto d'André Mathieu.

Dix ans, c'est déjà beaucoup. Mais pour le maestro de 32 ans, l'aventure musicale entre dans une nouvelle phase excitante. En novembre dernier, il a signé une entente avec Columbia Artists Management, agence qui représente les plus grands chefs: James Levine, Sir Colin Davis et Valery Gergiev, entre autres.

Tournant majeur dans sa carrière, cette nouvelle association a déjà commencé à lui ouvrir des portes comme chef invité, mais ses effets seront visibles surtout à partir de 2012 ou 2013.

«Depuis cinq ans, j'ai dirigé surtout en Europe, mais Columbia étant très présente aux États-Unis et en Asie, cela va me donner la possibilité de diriger de nouveaux orchestres», dit-il.

Il fera d'ailleurs ses débuts à Cincinnati et à Boston au cours de la prochaine année. Une tournée d'une douzaine de villes en Chine est aussi prévue avec l'Orchestre de la Francophonie et Alain Lefèvre, au printemps prochain.

Avec quelque 110 concerts au programme pour la prochaine saison, il n'a pas fini de vivre dans ses bagages! D'un continent à l'autre, il transporte deux valises: la première contient ses vêtements, l'autre déborde de partitions. Car le défi d'un jeune chef, c'est d'être constamment en train d'assimiler du nouveau répertoire.

«C'est très rare que je refais les mêmes pièces plus que deux ou trois fois dans la même année, dit-il. J'aime beaucoup l'apprentissage que cela me procure. Chaque année, je rencontre plusieurs nouveaux orchestres.»

Aurait-il le goût de poser ses valises plus longtemps au même endroit en étant directeur musical d'un orchestre? Par exemple, avec l'OSQ, qui se cherche un maestro? Habile politicien, il patine avec prudence autour de la question: «C'est évident que je ne dirais pas non à un poste de directeur musical, mais il faut que ce soit pour les bonnes raisons: que cela arrive au bon moment dans l'évolution de l'orchestre et dans la mienne, et que l'on se rencontre alors pour faire un bout de chemin ensemble, dit-il.

«L'avantage de travailler avec Columbia, c'est qu'ils gèrent ta carrière avec beaucoup de stratégie, un aspect que l'on néglige parfois comme musicien. Ils ont déjà reçu quelques propositions qu'ils ont étudiées et cela deviendra plus tangible au cours des deux prochaines saisons. Pour ce qui est de l'OSQ, je l'ai déjà dirigé et j'ai beaucoup aimé travailler avec lui; c'est l'un des plus vieux orchestres en Amérique du Nord. Si on me le proposait, il faudrait prendre le temps de s'asseoir pour regarder où ils veulent aller, mais beaucoup de facteurs entrent en jeu.»

Le concert de vendredi

Jean-Philippe Tremblay a déjà dirigé le 4e Concerto pour piano de Mathieu avec Alain Lefèvre comme soliste à Paris et à Shanghai, mais ce sera la première fois que les deux l'interprèteront avec l'Orchestre de la Francophonie.

«Il y a quelques années, j'avais trouvé un message d'Alain Lefèvre dans ma boîte vocale, se souvient-il. Il disait avoir aimé notre enregistrement de la Septième de Bruckner et voulait travailler avec nous. C'est comme ça que ça a commencé. Ce concerto de Mathieu est une oeuvre exigeante, et Alain est un grand poète du clavier, alors c'est beaucoup de travail pour tout le monde.»

Centenaire de Liszt oblige, l'oeuvre de Mathieu sera suivie de trois pièces symphoniques du compositeur. Un programme très virtuose pour un ensemble qui change plusieurs de ses musiciens tous les ans!

L'Orchestre de la Francophonie est formé de jeunes de 24 à 30 ans sélectionnés chaque année à l'occasion d'auditions. Sa composition varie d'un été à l'autre, et son objectif est avant tout pédagogique. Il vise à faire vivre aux musiciens un concentré de la vie professionnelle au cours d'un été.

En résidence depuis lundi dernier à Montréal, la «cuvée» 2011 a déjà commencé un véritable marathon musical du matin au soir: classes de maîtres, répétitions, auditions factices, travail avec des physiothérapeutes et autres spécialistes. Ayant reçu les partitions environ un mois avant leur arrivée, les recrues doivent maîtriser un répertoire complexe en peu de temps avant d'entreprendre une série de concerts partout au Québec.

Après Lanaudière, l'OF présentera deux concerts les 19 et 20 juillet au Palais Montcalm, à Québec, avec Jimmy Brière, Alexandre Da Costa et Denise Djokic comme solistes. Le 9 août, il interprétera la Symphonie fantastique de Berlioz à la Société des arts technologiques de Montréal, dans une soirée-concept inusitée avec disc-jockey et projections, avant d'enregistrer l'oeuvre sous étiquette Analekta. Finalement, le 12 août, il visitera le Domaine Forget pour un concert enregistré par la SRC avec la mezzo Julie Boulianne.

Orchestre de la Francophonie, le 15 juillet, à 20h, à l'Amphithéâtre Fernand-Lindsay.