Le 36e Festival de Lanaudière a connu un lancement qui, sans être exceptionnel, fut très réussi, samedi soir, à l'Amphithéâtre Fernand-Lindsay. Plusieurs facteurs, principalement le beau temps et le nom d'Alain Lefèvre, avaient attiré une foule impressionnante estimée à 5000 personnes, parmi lesquelles la première ministre Pauline Marois. Par ailleurs, le programme nous valut une heureuse surprise: l'ovation enthousiaste qui suivit le Concerto pour orchestre de Lutoslawski.

L'oeuvre n'est pas facile. Au contraire, elle est très difficile pour le chef et pour l'orchestre, sur les plans de la rythmique et de la rapide synchronisation entre les groupes, et elle est très difficile pour des auditeurs qui, venus pour Alain Lefèvre, voyaient sans doute le nom de Lutoslawski pour la première fois. Or, ces auditeurs ont manifestement aimé ce qu'ils ont entendu.   

Orford a choisi d'ouvrir sa saison avec un danseur à claquettes. Lanaudière a plutôt pensé aux compositeurs et en célèbre cinq dont les noms sont associés cette année à un anniversaire: un Italien, Verdi, un Allemand, Wagner, un Britannique, Britten, un Français, Poulenc, et le Polonais Lutoslawski.   

Comme le Concerto pour orchestre de Bartok, celui de Lutoslawski fait appel à la virtuosité du grand orchestre et donne tour à tour la vedette à des premiers-pupitres, à des sections complètes et à la formation entière. Il faut souligner ici la qualité de jeu que le chef Jean-Marie Zeitouni a obtenue de cet Orchestre du Festival qui n'est pas un ensemble autonome mais un «pick-up» de musiciens venus de nos différentes formations locales.   

L'oeuvre de quelque 30 minutes de durée reste cependant superficielle et sans profondeur. Mais elle demande le maximum aux musiciens et ceux-ci l'ont fourni. En conséquence, on sentit une certaine fatigue au sein de l'orchestre qui, ainsi poussé à ses limites, devait ensuite s'engager dans le Boléro de Ravel. C'était trop: la fameuse pièce reçut une exécution des plus ordinaires. Et encore : Zeitouni lui commanda un rappel: le Prélude au 3e acte de Lohengrin, qu'on écouta distraitement en quittant les lieux.   

En fin de compte, le meilleur moment de la soirée fut le Concerto en sol majeur de Ravel, avec en soliste l'«ambassadeur artistique» du Festival, le populaire Alain Lefèvre. Celui-ci fit vite oublier l'attente de plusieurs minutes qui précéda son entrée. Soliste et chef s'étaient visiblement mis d'accord pour jouer à fond la carte jazz et un peu canaille de la partition. Résultat: un piano extrêmement brillant, aux trilles mordants, en contrepoint à des bois sautillants et colorés, le tout contrastant avec un mouvement lent d'une indicible sérénité. On fit d'ailleurs savoir que le pianiste dédiait ce mouvement à la population de Lac-Mégantic.   

En début de concert: la brève Ouverture de fête, de Chostakovitch, composée à toute vitesse et jouée à la même allure.   

Les écrans géants, qui grossissent les visages des musiciens et les grimaces du chef, montraient celui-ci et le soliste commentant le programme.   

ORCHESTRE DU FESTIVAL. Chef invité: Jean-Marie Zeitouni. Soliste: Alain Lefèvre, pianiste. Samedi soir, Amphithéâtre Fernand-Lindsay, de Joliette. Dans le cadre du 36e Festival de Lanaudière.

Programme:

Ouverture de fête, op. 96 (1954) - Chostakovitch

Concerto en sol majeur pour piano et orchestre (1930-1931) - Ravel

Concerto pour orchestre (1950-1954) - Lutoslawski

Boléro (1928) - Ravel