«Imaginez-vous que je suis comme un peintre qui doit inventer de nouvelles couleurs et faire de nouveaux tableaux. Et qu'est-ce qui me donne l'essence même de la créativité? Ce sont les collaborations.»

Erik Truffaz a transporté sa trompette dans l'univers de la musique indienne comme il l'a fait résonner dans la sphère de l'electronica. Il a soufflé auprès des rockeurs des Dandy Warhols, s'est permis un projet où la griffe du dessinateur Enki Bilal était mise à contribution. À travers ces électrochocs créatifs, son quartette est demeuré son port d'attache. Or, là aussi, il s'efforce d'éviter le surplace, surtout qu'un nouveau membre s'y est greffé. À la batterie, Arthur Hnatek a en effet pris le relais de Marc Erbetta, parti vers de nouveaux horizons après une vingtaine d'années de loyaux services.

«Quand un musicien me dit qu'il va arrêter, ça m'inquiète toujours, je ne dirai pas le contraire, mais le changement apporte un vent de fraîcheur incroyable, constate Truffaz. Et ç'a été le cas avec ce batteur. C'est un jeune kid, qui habitait à New York, qui a joué avec Tigran Hamasyan, qui a un autre son, une autre culture, d'autres idées. Donc, ça nous a mené à un renouveau.»

Le filon africain

Il y a deux ans, Truffaz avait collaboré de près avec une compagnie de danse africaine. Assez pour vouloir s'imprégner davantage de ces sonorités lorsqu'est venu le temps de donner forme à l'album Doni Doni, paru plus tôt cette année. C'est donc ce qu'il a fait avec sa bande, au sein de laquelle on trouve également le compère de longue date Marcello Giuliani à la basse et le claviériste Benoit Corboz.

«C'est comme la mer et l'eau: on rentre la moitié des jambes au début et, une fois qu'on s'est un peu ambiancé, on va plus loin», explique le musicien.

«On a fait un premier pas avec cette compagnie de danse et ça nous a plu, cette énergie. On a décidé de composer un petit peu autour d'un thème africain.»

Truffaz est un leader démocratique, et l'ensemble de son équipe a mis la main à la pâte. Certains titres sont nés de jams, d'autres ont été complétés par les musiciens. L'ambitieuse Fat City, qui est dans un registre plus rock et jazz que world, est née d'une composition classique de Truffaz, revue par Hnatek.

Parallèlement, le trompettiste a approché la chanteuse Rokia Traoré, qui a pris le micro sur quatre titres. Le rappeur Oxmo Puccino a pour sa part greffé ses mots en toute fin d'album.

La liberté de la scène



Truffaz aime le fait que les chansons lui donnent la chance de tourner à la radio, pour que son matériel puisse rejoindre un grand nombre d'oreilles. Il fait toutefois une distinction entre le studio et la scène. Certes, il est difficile d'inviter un chanteur en tournée lorsque ce n'est que pour apparaître sur une poignée d'interprétations, mais surtout, il ne conçoit pas les albums comme il conçoit les concerts, avec son mariage unique de jazz, de pop et de rock.

«Sur scène, on présente toujours le spectacle sans voix, à part quand j'invite Oxmo Puccino, mais, à 90%, on le fait en quartette parce que j'aime beaucoup la liberté qu'offre la musique instrumentale sur scène. Le disque, c'est un peu comme un livre ou un film qu'on propose à écouter, alors que la scène, c'est comme une aventure.»

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À la salle Ludger-Duvernay du Monument-National le 8 juillet, 20h, dans le cadre du FIJM; à l'Impérial de Québec le 7 juillet, 21 h, dans le cadre du Festival d'été de Québec