Avec raison, Vijay Iyer estime que son jeu pianistique est celui d'un compositeur. En cela, il signifie que sa performance pianistique ne repose pas tant sur une technique éblouissante que sur la pertinence de ses idées et de sa sensibilité créatrice.

Une génération avant lui, des pianistes de jazz voyaient les choses ainsi, à commencer par un certain Paul Bley. Aujourd'hui, les «joueurs compositeurs» de la trempe de Vijay Iyer peuvent compter sur une technique supérieure, c'est-à-dire que leur coefficient de difficulté pianistique peut parfois être très élevé même s'il n'est pas le vecteur principal de leur expression.

Ainsi, en ce samedi au Gesù, le pianiste était seul sur scène pour une relecture singulière de Thelonious Monk (Work, 'Round Midnight), une interprétation souple et véloce de John Coltrane (Giant Steps), la magnifique déconstruction d'un standard de Broadway (I'm All Smiles, tiré du musical The Yearling), une ballade remodelée de Coleman Hawkins (Body & Soul). Au coeur de l'expression, toutes les phases imaginables de la musique contemporaine, écrite ou improvisée, ont rejailli (Spellbound And Sacrosanct, Cowrie Shells And The Shimmering Sea, Autoscopy, Remembrance, etc.).

Ainsi, malgré une légère interférence (silence SVP!), ce concert solo coiffait une des meilleures séries Invitation présentées au FIJM depuis un quart de siècle. «More than too much», aura résumé Vijay avant de s'exécuter pour le dernier rappel de ses représentations montréalaises.