Quelle que soit sa formation, duo, quartette ou sextette, le vibraphoniste Jean Vanasse ne joue jamais rien d'autre que ses compositions. Conversation avec un musicien accompli et un militant convaincu.

Jean Vanasse, dans un pays où le jazz n'occupe pas une très grande place, vous jouez d'un instrument lui-même assez peu usité: comment faites-vous pour rester à jour?

Vrai qu'il n'y a pas beaucoup de vibraphonistes ici. Du côté classique, on connaît Anne-Marie Simard; en jazz, il y a eu Jean St-Jacques, mais il n'en joue plus beaucoup. Quand j'enseignais au collège Marie-Victorin, j'avais une étudiante qui avait fait du vibraphone son instrument principal; elle est maintenant à McGill en interprétation jazz. L'an passé, je suis allé à New York pour rencontrer Warren Chiasson, un vibraphoniste canadien qui vit là-bas depuis 50 ans: ça m'a permis de me ressourcer, de reprendre contact avec la tradition des Lionel Hampton, Red Norvo et Gary Burton, une tradition dont je n'ai jamais été très proche par ailleurs, parce que je ne joue que mes compositions.

En regardant la liste de vos apparitions au FIJM, on voit que vous n'y avez pas joué entre 1993 et 2007; ce «trou» de 14 ans est-il dû à des raisons artistiques ou politiques?

Un peu des deux... À la fin des années 90, je travaillais surtout pour le cinéma, la télévision et la radio. Après, les raisons de mon absence sont devenues politiques effectivement. Comme j'avais été un des membres fondateurs du Off Festival de jazz en 2000, il n'était pas question de jouer au Festival de jazz de Montréal: j'aurais été malvenu, le Off ayant été fondé en réaction au gros festival où la communauté jazz de Montréal se voyait mal représentée. En même temps, on n'avait rien contre les gars qui y allaient: Yannick Rieu jouait au FIJM puis, le même soir, venait jouer au Off avec nous autres.

Quelle est la situation aujourd'hui?

Les relations se sont adoucies. La communication est meilleure entre les deux groupes. Il faut aussi dire que le Off Festival a maintenant lieu à l'automne, ce qui fait un autre temps fort pour le jazz à Montréal. Il n'y en a jamais de trop! La scène n'est pas payante: 100$ par soir pour trois sets, tu ne fais pas vivre une famille avec ça! Les musiciens qui n'enseignent pas ont de la misère à gagner leur vie...

Qu'avez-vous au programme pour le concert de lundi?

Des pièces que j'avais écrites pour mon duo avec Miroslav Vitous, le contrebassiste tchèque. Une autre, Thanks, Billy! , que j'avais écrite en hommage à Bill Evans. Et plusieurs que j'ai composées pour mon sextette que j'ai dû abandonner parce que c'était devenu trop compliqué à coordonner. Sans parler des voyages... Maintenant, je joue en quartette, comme dans le temps de l'Orchestre Sympathique, toujours rien que de la musique originale.

Jean Vanasse Quartette, avec Sylvain Provost (guitare), Frédéric Alarie (contrebasse) et Jean-François Barbeau (batterie). Ce soir à l'Astral à 18h.