Wallace Roney n'a pas le pouvoir attractif que précède sa réputation, force est de constater. À 22h30, lundi soir, le Gesù n'était pas archiplein comme il aurait normalement dû l'être pour le dauphin désigné de Miles Davis.  Pourquoi donc? Essayons de comprendre à travers ce qu'on vu et entendu sur scène.

D'abord, on vent que les consignes de sonorisation ont été bancales, beaucoup plus bancales que d'ordinaire. Même dans un contexte de festival, on m'a laissé entendre que c'était un peu tout croche. Wallace Roney et sa bande montent sur scène, un des claviers ne semble pas fonctionner et le trompettiste se met à zigonner sur l'instrument de son sideman. Ça s'annonce laborieux...

Étrangement, les éléments finissent par se mettre en place. Wallace Roney et deux saxophonistes (dont le frangin Antoine Roney au ténor) exposent le thème de Quadrant, premier titre au programme de ces quelques pièces longuement déclinées.

Amorcées par le trompettiste et repris par les deux autres saxos, ces ponctuations entrent en fusion avec une section rythmique incandescente, dans le tapis du début à la fin, sauf exception comme la ballade soul Let's Wait Awhile - Rashaan Carter, contrebasse, Kush Abadey, batterie. Sur ses divers claviers, Aruan Ortiz multiplie les attaques percussives et les effets orchestraux. Ses improvisations consistent davantage en une série de salves harmoniques imposées par le rythme que d'articulations mélodiques ... qu'il arrive parfois à déployer.

Souvent, on a cette impression générale de se replonger dans les années 80 ou les années 60 de Miles, même si les réformettes de Wallace Roney lui confèrent une certaine originalité. Quant à son jeu de soliste, on ne peut vraiment pas dire qu'il a été fort lundi soir, le son collectif l'a finalement (et heureusement) emporté sur les performances individuelles. En somme, un concert un peu bancal, certes inégal... Banal ? De cette expérience en sextuor ont jailli quelques moments d'inspiration, le manque de rigueur sur scène domine l'impression générale au bout du compte.

En somme, je ne crois pas que ce trompettiste et leader montre actuellement la voie à suivre dans le jazz actuel, comme sa réputation le présume. L'histoire nous dira un jour comment Wallace Roney a composé avec cette pression « historique » qu'il a sur les épaules depuis que Miles l'avait pris sous son aile il y a de ça un quart de siècle... À 50 ans, le jazzman a encore de bonnes années devant lui pour se démarquer vraiment mais...  Pour y parvenir, m'est d'avs qu'il devra resserrer considérablement l'ensemble de son approche.

C'est loin d'être chose faite.