Pour lancer son deuxième festival ARTDANTHÉ, le directeur artistique du Théâtre La Chapelle, Jack Udashkin, a fait appel à Ève-Chems De Brouwer. La comédienne et metteure en scène française y présentera sa pièce J'entends les murs, qui explore notre relation avec les aveugles.

La première fois qu'Ève-Chems De Brouwer a posé ses valises au Québec, c'était il y a deux ans, à l'invitation du Festival TransAmérique (FTA), dans le cadre des Rencontres internationales des jeunes créateurs. Elle avoue avoir eu un coup de coeur. «Les relations sont chaleureuses et enthousiastes, dit-elle. Venant de Paris, on a peine à le croire...»

Depuis, la comédienne née en France d'une mère égyptienne et d'un père belge, qui a notamment joué dans la version française de la série Les invincibles, a décidé de rester ici.

J'entends les murs a été créé à la suite d'une rencontre qu'Ève-Chems De Brouwer a faite avec une jeune femme de 25 ans ayant perdu la vue du jour au lendemain. Son idée première était de faire une fiction radiophonique sur sa vie. Mais rapidement, elle s'est rendu compte que ça devait se passer sur scène.

«Voir une personne aveugle faire sa vie, c'est fascinant, nous explique-t-elle au cours d'un entretien téléphonique. Il faut suivre tous les gestes de repères, de toucher, de découverte. Un jour, cette jeune femme est tombée amoureuse... Je me suis demandé: «Comment on tombe amoureux quand on ne voit pas?»»

De cette question est né son projet J'entends les murs qui a d'abord fait l'objet d'un film court de 24 minutes réalisé par Marie Augustin, et qui met en scène six comédiens, dont trois sont aveugles. «C'était important pour moi de réunir sur scène des gens qui n'étaient pas aveugles. C'est l'échange entre eux qui m'intéresse.»

La pièce présentée cette semaine, elle, met en scène la danseuse d'origine albertaine Jody Hegel et deux comédiens aveugles Maurice Decelles et Alexandre Demange. «J'ai conçu et imaginé ce spectacle en fonction d'eux. Ce qu'ils disent sur scène, ce sont des choses de leurs vies.»

«Aujourd'hui, avec l'importance du visuel dans nos vies, poursuit la metteure en scène, comment on fonctionne quand on ne voit pas. Où se passe la séduction? Cette pièce est aussi un prétexte pour redécouvrir nos sens en tant que voyant. Je me suis d'ailleurs demandé: si je deviens aveugle, qu'est-ce qui va me manquer le plus?»

Dans J'entends les murs, Ève-Chems De Brouwer, qui s'est tournée vers la danse depuis quelques années s'est posé une autre question: est-ce qu'une personne aveugle peut être spectatrice d'un show de danse? «La réponse est oui, nous dit la metteure en scène. Par le toucher. C'est cette expérience que nous faisons sur scène.»

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Du 15 au 17 novembre à La Chapelle. Info: Lachapelle.org