La directrice artistique de Phénomena, D. Kimm, ouvre son festival ce soir avec une nouvelle création des Filles électriques, La mythologie expliquée. Une série de tableaux vivants inspirés des grandes figures de la mythologie grecque, présentés dans le bassin du Bain Saint-Michel.

D. Kimm est consciente de son pouvoir de persuasion. Celui d'attirer dans ses filets des artistes provenant d'à peu près tous les milieux. Elle l'avoue elle-même, «mes projets sont souvent démesurés par rapport à mes moyens. Ma force, c'est de réussir à mobiliser des artistes incroyables dans des projets de fou...»

Parmi eux, il y a des collaborateurs de longue date comme l'éclairagiste Lucie Bazzo ou le compositeur Guido del Fabbro, qui a notamment travaillé avec Pierre Lapointe et le duo Forêt. C'est lui qui a composé la musique des 10 tableaux de La Mythologie expliquée. «C'est un trésor national! Il peut tout faire», s'exclame D. Kimm.

Clara Furey et Émilie Laforest formeront le choeur. «Je voulais deux chanteuses dans l'idée grecque. Comme dans les péplums, vous savez des films comme Ben-Hur, par exemple. Je voulais aussi que ce soit lyrique. Elles sont donc habillées en toges et portent des couronnes de fleurs», détaille la conceptrice.

Les autres interprètes: Julie Desrosiers, Steeve Dumais, Lucas Jolly, Allesandro Sordoni, Jacqueline van de Geer, des artistes de la scène underground.

«J'ai toujours aimé travailler avec des performeurs qui ne sont pas des acteurs professionnels, nous dit D. Kimm. Mais mon but, c'est de rendre l'avant-garde accessible. Comme je le faisais avec la poésie. Je veux rendre les spectacles interdisciplinaires, flyés, underground, accessibles. Tout le monde a droit à l'avant-garde. Pas juste les initiés.»

C'est au cours d'un stage avec le Théâtre de la Pire espèce que D. Kimm se rend compte qu'elle ignore à peu tous les grands mythes grecs. «J'ai commencé à lire là-dessus. Quand j'ai compris la structure, j'ai trouvé ça fascinant. Les rapports incestueux entre les personnages. Tout se tient. C'est aussi très fantaisiste!»

Tableaux vivants

Comme elle souhaitait depuis longtemps faire un spectacle avec des tableaux vivants - inspiré du travail de l'artiste de Québec Claudie Gagnon -, elle a décidé cette fois de combiner les deux. Narrant les histoires d'Éros et Psychée, de Persée et les Gorgones ou encore d'Hadès et Perséphone en explorant cette forme artistique.

«J'aimais cette idée ancienne, un peu quétaine, où les gens mimaient, par exemple, le martyre d'un saint, la scène de la Nativité dans la crèche de Noël ou encore la vie de cour. Dans ce contexte, les costumes et les perruques sont très importants... Je veux que ce soit somptueux.»

Quelles sont les images qui lui ont inspiré ces 10 tableaux? «Plusieurs, répond D. Kimm. Au cours d'une visite à Milan, dans un musée, je trouvais que les personnages des tableaux religieux avaient l'air de travestis. J'ai exploré cette idée-là. Je me suis aussi beaucoup inspirée du film Satyricon de Fellini.»

Grotesque et naïf

D. Kimm a donc fait une mixture avec la narration de ces mythes, assurée par le comédien Claude Laroche, les projections d'Allison Moore, la musique de Guido del Fabbro et les actions des interprètes. «C'est très grotesque. Il y a un côté volontairement naïf. C'est drôle et charmant», estime-t-elle.

Pour un de ces tableaux, celui de Poséidon (dieu de la mer), elle a fait appel à 14 élèves de l'école secondaire Saint-Louis, dans le Mile End. «Je les ai embrigadés! J'ai été voir le directeur, je lui ai parlé de mon projet. Ils font une chorégraphie, ils ont fait leurs costumes, on a répété, ils sont super prêts.»

D. Kimm n'en démord pas, l'interdisciplinaire ne doit pas simplement juxtaposer les éléments. Un show de danse, même s'il y a des projections, ça reste de la danse. En interdisciplinaire, les différents éléments ne sont pas là pour décorer, ils font partie du processus. C'est plus exigeant.»

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Jusqu'au 20 octobre au Bain S.