La 11e présentation du festival Suoni per il Popolo annonce un florilège de créateurs avant-gardistes et marginaux, du jazz contemporain de Farmers by Nature au noise du précurseur Keiji Haino en passant par le psych folk de Molly Sweeney, l'électro d'Outer Space ou la pop arabe d'Omar Souleyman.

Du 5 au 25 juin, la Sala Rossa et la Casa del Popolo accueilleront la grande majorité des concerts du festival Suoni per il Popolo, sauf exceptions à l'Il Motore ainsi qu'au cinéma Blue Sunshine.

«La ligne générale? On aime garder ça assez éclectique», rappelle Steve Guimond, directeur artistique de cet événement annuel devenu incontournable pour les férus de la marge.

Contrairement aux autres festivals montréalais, les Suoni per il Popolo présentent quotidiennement un petit nombre de concerts plutôt qu'une masse répartie sur quelques jours. D'après ses organisateurs, le déplacement des FrancoFolies en juin n'en aurait aucunement affecté l'affluence; les auditoires qui s'y présentent n'ont que peu à voir avec la chanson francophone.

«Le jazz contemporain reste au coeur de notre festival, fait observer Guimond. Nous commençons toujours à construire notre grille de concerts avec des artistes du jazz, car cette relation remonte aux débuts des Suoni.»

Ainsi, le multi-instrumentiste Charles Gayle, qui fut de plusieurs aventures free-jazz (Rashied Ali, Cecil Taylor, Pharoah Sanders, Archie Shepp, etc.), ouvre le bal du volet jazz contemporain le 8 juin. On apprendra que le saxophoniste David S. Ware a survécu à une transplantation du rein et donnera un concert solo le 14 juin. Le 19, l'excellente pianiste japonaise Satoko Fujii s'amènera avec son quartette.

Constitué du grand pianiste Craig Taborn (Steve Coleman, Dave Binney, Tim Berne, etc.), du batteur Gerald Cleaver et du saxophoniste William Parker, le trio Farmers by Nature est très attendu le 21 juin. Le Full Blast Trio du saxophoniste allemand Peter Brötzmann, qui comporte une section rythmique helvète plus proche du hardcore/métal que du jazz, sera à Montréal le 22 juin. Le même soir, le saxophoniste Joe McPhee partagera la scène avec l'ensemble européen The Thing. Le lendemain, le quintette européen Atomic, que dirige le batteur Paal Nilssen-Love, sans conteste l'un des plus doués (et qui participe également à The Thing), complétera cet alignement de choix.

Artistes en émergence

Jazzifiés depuis leurs débuts, les Suoni per il Popolo s'appliquent également à faire évoluer les notions de pop, d'électro ou de noise en explorant des avenues inédites de ces tendances.

«Ces artistes sont majoritairement émergents; ils doivent se débrouiller eux-mêmes pour la plupart. Nous sommes ainsi en contact direct avec ces musiciens qui n'ont pas d'agent ou de manager. C'est très stimulant pour nous de contribuer à leur développement.»

Que retient spontanément Steve Guimond? Nous avons noté ses suggestions.

Présenté le 5 juin, le groupe américain Future Islands suggère une mixtion de pop new wave aux accents minimalistes. Le 6 juin, l'étrange guitariste Glenn Jones fera dans le blues étrange. On mise fort sur la soirée «hip hop politique» du 9 juin, avec la rappeuse anglo-palestinienne Shadia Mansour, le MC amérindien Samian et The Narciscyst, rappeur montréalais d'origine irakienne.

Depuis longtemps, le festival espérait la venue du renommé bruitiste japonais Keiji Haino, qui se produira pour la première fois à Montréal en 15 ans - le 10 juin. Invité le lendemain, le duo ontarien Junior Boys «s'inscrit parmi les grands noms de la pop électro». Le 13 juin, les Suoni reçoivent Omar Souleyman, artiste syrien qui présente un mélange absolument déjanté de vieille et de nouvelle pop arabes.

Le 15 juin, il faudra découvrir le Belge Lieven Martens, qui évolue sous le pseudonyme Dolphins Into The Future, «clairement dans le cutting edge de la nouvelle musique électronique». Un projet parallèle du groupe électronique américain Emeralds, un des plus remarqués de cette nouvelle scène, s'intitule Outer Space et partagera le même programme que Radio People, le 21 juin.

Couleur locale

Enfin, les Suoni accordent une place de choix aux artistes de l'underground local. Steve Guimond souligne les soirées essentielles.

Le 5 juin, l'événement Soundtracks a été proposé par Lisa Gamble, multi-instrumentiste de talent qui a tourné notamment avec Clues. Elle a choisi des artistes visuels et cinéastes d'ici dont les oeuvres seront accompagnées par des musiciens d'ici. Le 6 juin, l'auteure-compositrice-interprète Molly Sweeney lancera son premier album, Gold Ring and Fur Pelts, de style psych folk.

Le 7 juin, Will Eizlini dirigera six voix pour une interprétation de Stimmung, oeuvre de Karlheinz Stockhausen. Le même soir, The Lost Orchestras regroupera 21 musiciens issus de différentes formations (Godspeed, Besnard Lakes, Bell Orchestre, The Luyas, etc.); sous la direction du percussionniste Bill Hesselink, ils interpréteront la musique de Bernard Hermann, soit la trame sonore du film Vertigo d'Alfred Hitchcock.

Le 8 juin, Sam Shalabi reprendra du service avec son quartette Shalabi Effects. Enfin, un programme sera consacré au label montréalais Constellation, mettant en relief le saxophoniste Colin Stetson et le duo montréalais Hangedup que forment le batteur Eric Craven et l'altiste Gen Heistek.

Encore cette année, tous les souterrains convergent vers les Suoni.

> Infos: www.casadelpopolo.com/suoniperilpopolo