Novembre est là. Pendant que les arbres se dénudent de leurs dernières feuilles, le visage de ces messieurs, lui, se pare d'une luxuriante pilosité. Eh oui: Movember, mois de la sensibilisation au cancer de la prostate, remet la moustache dans les priorités du moment. Quelle est la parenté, entre la «stache» western de Damien Robitaille et la «Tom Selleck» de son oncle spirituel, Donal Lautrec? Nous avons étudié cette urgente question...

Honoré Mercier la portait abondante et stylisée. Celle de René Lecavalier était mince et raffinée. Dans Du tac au tac, la grosse moustache de Mario Duquette (Michel Forget) incarnait la bonhomie mononcle du «comptable agréable», reprise de façon humoristique par le Gérard de Cruising Bar. Monsieur Tranquille portait la moustache ouvrière. Celle de Jean-Luc Mongrain était pragmatique et terre-à-terre. Et puis il y a eu Richard Z. Sirois, le dernier des moustachus, qui a rasé sa marque de commerce et marqué la fin d'une ère.

MC Gilles, toujours à l'avant-garde du vintage, a lui-même porté la moustache, plusieurs années avant que tout le Mile End s'y mette. «Je l'ai fait pour l'ironie de la chose. Quand on a une moustache, le message qui est lancé est: Jamais je ne jugerai les autres parce que regarde ce que je fais avec ma face!», s'amuse le coloré personnage, qui pense que la mode Instagram, avec ses photos un peu jaunies, est propice à la renaissance du style «moustache-habit à carreaux» des années 70.

«L'essayer, c'est l'adopter», semblent avoir conclu, en choeur, plusieurs néo-moustachus de Movember qui, rendu au jour de l'An 2011, avait conservé ce signe de masculinité longtemps enfoui dans le tiroir étiqueté «mononcle».

Mais au dire de certains moustachus chevronnés, les nouveaux venus dans ce club sélect ont encore quelques leçons à recevoir de leurs aînés...

«Savez-vous, je trouve que, dans le cas de bien des jeunes qui portent la moustache, aujourd'hui, on dirait que c'est emprunté», dit Gilles Côté, septuagénaire du Lac-Saint-Jean qui s'est fait moustachu à l'âge de 18 ans.

«J'admirais beaucoup l'acteur Clark Gable, je voulais lui ressembler! La moustache allait bien avec mon visage. Avez-vous déjà embrassé un homme avec une moustache?», lance celui qui estime que moustache et distinction doivent aller de pair. «Avec une moustache, on doit marcher la tête haute. Et autrefois, j'étais plus tatillon : j'aimais porter aussi une belle cravate et un beau chapeau...»

Michel Forget, qui a épousé la moustache quand il est entré dans la peau de Mario Duquette, dans Du tac au tac, n'a jamais rasé la sienne. Pour composer ce personnage qui, à ses débuts, avait une fausse moustache, le comédien s'est inspiré d'un de ses oncles. Il admirait aussi le côté «homme» de la moustache, ainsi que son potentiel fantaisiste, que transmettait Dali. «Ma femme aime ça, on vit ensemble depuis 37 ans, je peux bien lui faire ce plaisir-là, ça ne coûte pas cher.»

Oui, à une époque où elle ne s'agençait pas au tatouage et où elle se portait sans ironie, la moustache était le signe qu'on était un homme. Un vrai. Et pas juste en novembre.