Traductrice de romans jeunesse comme Bob l'éponge et Lizzie McGuire, courriériste du coeur à Vrak TV et auteure de plusieurs ouvrages destinés aux adolescents, Catherine Girard-Audet a publié en 2011 le premier volet de La vie compliquée de Léa Olivier, qui raconte les mésaventures d'une jeune fille qui quitte son village natal pour aller s'établir à Montréal avec sa famille. Le sixième tome de cette série, Tornades, a été publié en mai.

En tant qu'écrivain, est-ce que vous considérez Montréal comme une ville qui nourrit l'inspiration?

Certainement! D'autant plus que la ville a inspiré l'idée de base de ma série La vie compliquée de Léa Olivier. Tout comme Léa, j'ai quitté ma ville natale pour m'installer dans la métropole, quand j'avais 13 ans. Mon arrivée ici, à l'adolescence, a été un choc au sens positif du terme. J'ai appris à m'inspirer de cette ville, à me remplir de ses saveurs, de ses odeurs, des cultures de ses différents quartiers. Tout cela m'a inspirée pour la création de mes personnages et de leurs mésaventures. Mes romans sont directement liés à Montréal, qui est pour moi une ville extrêmement riche, dans son caractère multiethnique et ses nombreux contrastes.

Décrivez votre appartenance à la francophonie.

Mon livre a été publié en France, en Belgique, en Suisse, au Québec et au Canada francophone. Le fait d'être ainsi publiée dans quatre pays de la francophonie renforce donc cette appartenance. Quand la série a été exportée dans les pays francophones, cela m'a permis de me rapprocher de mes lectrices là-bas, avec qui je communique par courriel ou par Facebook. Les sujets et problématiques que j'aborde avec elles transcendent les continents. Cela dit, La vie compliquée de Léa Olivier n'a pas été traduit: seules quelques petites expressions ont été changées, pour clarifier la compréhension. Cela permet à mes lecteurs de voyager dans une autre atmosphère et de se familiariser avec notre façon de discuter entre amis. Enfin, comme tous les auteurs qui appartiennent à la francophonie, et sont entourés d'anglophones, la défense du français me tient à coeur et je suis consciente de la nécessité de travailler très fort pour préserver le français. Dans mon écriture, je m'efforce de garder un français correct, pour aider les jeunes à ne pas écrire au son, à diminuer leur usage des anglicismes et à ne pas dénaturer la langue.

Pensez-vous que le français que l'on écrit et que l'on parle à Montréal évolue en s'ouvrant sur le monde?

Je dirais oui et non.

Oui, car Montréal est une ville multiculturelle où vivent des auteurs qui proviennent de toutes sortes de milieux. On a l'impression de voyager, quand on lit Kim Thúy ou Dany Laferrière, qui sont des ambassadeurs de la diversité culturelle de la ville. En ce sens, il y a une ouverture sur le monde.

En revanche, les auteurs d'ici ont appris à cultiver une fierté pour une culture qui est propre au Québec. Personnellement, j'aime transporter le Québec avec moi, quand je visite l'Europe. J'explique que quand il fait -20, c'est une tuque que l'on porte, pas un bonnet...

À votre avis, quels sont les auteurs «phares» de la littérature montréalaise, à l'heure actuelle?

Pour moi, ce sont les livres que j'ai lus pendant mes années d'étude. Des classiques, par exemple, Les chroniques du Plateau Mont-Royal de Michel Tremblay, cela est pratiquement la base. Parmi ceux qui m'ont particulièrement touchée, Folle de Nelly Arcan, une histoire très particulière avec une fin tragique, qui a marqué toute une génération. Les romans de Nelly Arcan sont empreints de Montréal, j'ai fréquenté ces mêmes bars, j'ai retrouvé des rues de Montréal que je connais. Scrapbook de Nadine Bismuth, qui est campé dans Montréal et Paris, m'a aussi touchée, parce que comme son auteure, j'ai étudié la littérature française à McGill et je voyageais souvent à Paris, parce que j'avais un chum là-bas. La série Éléonore, de Nadia Lakhdari King, avec son personnage principal qui a fréquenté Brébeuf et ses points de référence comme La Maisonnée, que je pouvais reconnaître.

Qu'est-ce qui relie la littérature montréalaise à celle des autres lieux de la francophonie?

Évidemment, l'amour et la défense de notre langue, qui est à la base du désir d'appartenance à la francophonie. La littérature montréalaise a un vocabulaire qui lui est original et lui appartient, tout comme chaque région du monde a sa propre culture et sa propre littérature. Il y a dans la littérature montréalaise, comme dans celle des autres lieux de la francophonie, un pouvoir de faire voyager et montrer qu'il y a autre chose que la France.

En terminant...

J'éprouve un immense bonheur d'être invitée d'honneur du Salon du livre cette année. Quand j'avais 13 ans, les sorties au Salon étaient pour moi plus excitantes que d'assister à un match du Canadien. Je suis une dévoreuse de livres et le fait de me retrouver au Salon du livre, dans cette effervescence, de me dire que je fais partie de ce milieu, est presque comme un rêve pour l'ado un peu perdue qui venait d'arriver à Montréal que j'ai été.

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Catherine Girard-Audet participera à Sophielit présente: Catherine Girard-Audet, jeudi à 12 h, à la Place Confort TD.