Près de 20 ans après avoir posé ses valises dans un studio de SoHo à New York, l'artiste peintre Corno a senti le besoin de troquer les pinceaux contre les stylos.

L'artiste native de Chicoutimi, qui ponctue maintenant presque chacune de ses phrases par des «Ya!» bien sentis, propose un début d'autobiographie dont la consonance est semblable à celle de ses toiles: colorée, jazzée, pop, festive.

 

Publié aux Éditions La Presse, Cornographie n'est pas un livre sur l'art. C'est davantage une chronique sur l'installation d'une artiste dans sa ville d'adoption avec des hauts et des bas dignes des plus fameux rollercoasters de Coney Island. Un condensé sur ses «premiers périls en exil», comme elle le dit dans la préface de son ouvrage. La Presse a échangé avec Corno, jointe à son studio de New York, plus tôt cette semaine.

Q: D'où vient l'idée de faire ce livre?

R: Beaucoup de jeunes m'écrivent via les médias sociaux et me demandent comment les choses se sont passées à mon arrivée à New York. Comment j'ai réussi à m'installer? Je n'ai pas le temps de répondre à tout le monde. J'ai alors décidé d'écrire un livre pour expliquer ce qui m'est arrivé. Au départ, je me suis dit que j'allais faire un genre de biographie, mais ça m'ennuyait. Alors je me suis dit de l'écrire de la façon dont ça s'était passé.

Q: Justement. Votre écriture est hachurée, saccadée, nerveuse, indomptable, survoltée. Elle est, finalement, à votre image comme à celle de votre peinture.

R: Exactement. Ça me ressemble. On écrit comme on peint. On a la même énergie dans tout ce qu'on fait. Le médium est différent. À mon avis, la peinture, même figurative, est plus abstraite dans la tête des gens. Un tableau est plus difficile à comprendre. Dans ma peinture, il y a beaucoup d'humour, d'énergie, d'exagération, de pulsation. Mais quand on l'écrit dans un livre, c'est plus facile à voir et à comprendre.

Q: Lorsque vous peignez, vous écoutez de la musique très forte avec des écouteurs. Avez-vous écrit le livre dans les mêmes conditions?

R: Non. J'ai souvent écrit dans des cafés bruyants de New York. Lorsque je décide de faire quelque chose, j'ai une grande capacité de m'isoler, de me concentrer. Et il n'y a rien pour me sortir de ça. Donc, j'aurais pu écrire le livre en écoutant de la musique, mais ça n'a pas été le cas. C'est le fun aussi d'explorer d'autres façons de travailler. Ça fait 30 ans que je suis peintre alors j'ai apprécié cette idée d'explorer une autre facette de ma personne.

Q: Votre livre est sans pudeur. Vous parlez de drogue, de vos amours, de choses très intimes du quotidien. Pourquoi?

R: Mon but, c'était vraiment d'expliquer comment ça se passe. Les gens ne s'imaginent pas ce que c'est que d'être peintre, la masse de travail que cela prend. Et ça en prenait beaucoup en arrivant ici. Mais je voulais quand même l'écrire sur le ton de la légèreté tout en montrant que ce n'était pas évident. Être un artiste, ce n'est pas une vie facile et ça ne le sera jamais.

Q: Pourquoi ne pas avoir abordé l'impact de votre installation à New York sur votre oeuvre?

R Ce n'était pas ce que je voulais faire. C'est peut-être le sujet d'un autre livre. Je voulais décrire des situations sur ce que j'avais vécu en arrivant. Et puis, la peinture, c'est toute ma vie. Je voulais montrer autre chose de qui est Corno, le personnage à côté des tableaux.

Q: New York sera-t-il un jour trop petit pour vous?

R: Non. C'est sûr qu'il y a 20 ans, mes buts n'étaient pas les mêmes. Maintenant, je cherche peut-être plus de tranquillité, d'espace, etc. Mes besoins sont différents. New York répond encore à ce que je veux. La ville se refait tous les jours. C'est une machine qui n'arrête jamais. Je ne me vois pas arriver à la fin de cette ville-là. Ce sont les inspirations qui changent.

Q: Est-ce plus difficile de s'installer à New York aujourd'hui?

R: Je pense qu'il est encore possible de réussir. C'est ça, le miracle de New York. La porte est ouverte. Si tu le veux, tu vas trouver ton spot. Une chose est sûre: New York n'est pas une place facile. Il faut vraiment vouloir. Si tu n'es pas convaincu, tu ne réussiras pas. Tu vas repartir. Je crois que c'est un peu cela que j'ai écrit.

Corno (Joanne Corneau) sera en séance de dédicaces au stand (247) des Éditions La Presse du Salon du livre aujourd'hui et demain de 12h à 14h.

Cornographie. Corno. Éditions La Presse. 193 pages