Le grand cahier d'Agota Kristof est un roman qui attire souvent de jeunes lecteurs. C'est à l'adolescence que la comédienne Catherine Vidal a été initiée à l'univers très particulier de Kristof. «Mon prof de morale m'a suggéré de le lire. Au début, j'ai été troublée. Ça a été un choc», exprime la jeune femme, qui a adapté pour la scène ce récit qui fraye avec les thèmes de la zoophilie et de la pédophilie. Ses amis Olivier Morin et Renaud Lacelle-Bourdon interpréteront les impassibles jumeaux, sans foi ni loi.

«Je ne veux pas montrer l'enfance volée ou le temps de la guerre. Ce qui m'intéresse, c'est d'illustrer comment un humain s'en sort psychologiquement», fait valoir Catherine Vidal, que je rencontre en compagnie de ses compagnons de travail, les comédiens Olivier Morin et Renaud Lacelle-Bourdon. Avec ce dernier, elle s'est attaquée aux écrits de l'écrivain suisse-allemand Robert Walser à l'automne dernier, dans le cadre d'un spectacle présenté au Festival international de la littérature.

 

Elle redevient metteuse en scène dans la salle intime du Prospero, avec cette proposition pour deux acteurs dans laquelle elle ne conserve que «l'essentiel» du roman de Kristof. C'est-à-dire les personnages des jumeaux, de Grand-Mère, de Bec de lièvre, de la servante et de la libraire.

Lacelle-Bourdon et Morin auront la colossale tâche d'interpréter tous les personnages. «Il y a un humour noir dans le roman, du fait qu'ils sont dans des situations cruelles», estime Olivier Morin.

Plutôt que d'attendre...

Catherine Vidal est un oiseau rare dans le paysage théâtral montréalais, où sont rarissimes les demoiselles qui osent se lancer dans la mise en scène. Tout de même active en tant qu'actrice (on l'a vue dans Silence en coulisses, en juin à Repentigny, dans la reprise d'Ah la vache! , l'automne dernier au théâtre jeunesse, et dans Lortie, à Espace Libre), elle préfère l'action créatrice à l'attente angoissée à côté du téléphone...

«On ne sait jamais quand les contrats vont arriver. Si tu attends le moment parfait pour monter un projet, ça n'arrivera jamais.»

Sa transposition au théâtre du Grand cahier a débuté par un laboratoire d'exploration l'année dernière, dans la salle intime du Prospero. Avant tout, c'était l'ultime exercice d'endurcissement de l'esprit décrit dans le roman qui l'intéressait, dans son adaptation scénique. Pendant l'automne, elle a glané des trucs rouillés, des objets détournés de leur sens, pour nourrir le jeu de ses deux interprètes. «Je voulais que dès la première répétition, les acteurs aient en mains tous les objets.»

Un texte, trois bouts de ficelle et des jeunes acteurs qui ont du souffle. La relève se porte comme un charme.

Le grand cahier d'Agota Kristof, adaptation et mise en scène de Catherine Vidal, du 13 au 31 janvier dans la salle intime du théâtre Prospero.