Vous n’en pouvez plus des reprises usées de La petite vie du samedi soir ? Bonne nouvelle, alors. Claude Meunier concocte de nouveaux épisodes de sa sitcom culte, que Radio-Canada ressuscitera pour fêter ses 30 ans d’existence à l’automne.

Selon mes espions, tous les acteurs de la distribution originale de La petite vie reprendraient leurs rôles, sauf Serge Thériault, 74 ans, qui éprouve de graves problèmes de santé. L’interprète de Jacqueline Paré, alias Moman, souffre d’une dépression majeure qui l’enferme dans sa maison depuis plus de sept ans, comme l’a révélé le touchant documentaire Dehors Serge dehors, de Martin Fournier et Pier-Luc Latulippe, sorti en 2021.

Et sous quelle forme la famille Paré et son patriarche Ti-Mé, grand fan de poubelles et de lit vertical, revivront-ils à Radio-Canada ? Difficile à déterminer précisément. Des sources parlent de quatre épisodes flambant neufs, d’autres de six.

Le créateur de cet univers absurde, Claude Meunier, n’était pas disponible pour une entrevue jeudi. J’ai aussi contacté tous les agents des comédiens de cette émission classique et personne n’a émis le moindre commentaire. De son côté, Radio-Canada ne souhaite rien confirmer pour le moment.

Maintenant, comment se déploiera La petite vie sans son cœur battant, soit celui de la matriarche Jacqueline, célèbre pour son bonnet de nuit et sa succulente dinde ? Le mystère plane. Ce serait une très mauvaise idée de confier ce rôle à un autre acteur.

Moman, c’est Serge Thériault, point barre, avec les mimiques et les intonations que le comédien a créées. La personne qui lui succéderait aurait l’air d’en faire une pâle imitation.

Une façon de contourner l’absence de Serge Thériault serait de rendre Ti-Mé (Claude Meunier) veuf, ce qui permettrait à l’auteur de plonger son héros barbu dans des situations familiales encore plus déroutantes.

Selon mes infos, Marc Labrèche aurait été le plus réticent à revêtir le costume du gérant de caisse populaire Rénald « Pinson » Paré, l’époux de la très colorée et aérienne Lison (Josée Deschênes), connue sous le surnom de Creton.

La famille Paré réunissait également autour de la table en formica Thérèse (Diane Lavallée), madame steak-blé d’Inde-patates, de même que son mari menteur Réjean Pinard (Marc Messier), qui parle de lui-même à la troisième personne du singulier.

L’aîné des enfants Paré, l’adulescent Rod (Bernard Fortin), a toujours été le chouchou de Moman, tandis que Caro (Guylaine Tremblay) a porté l’étiquette de rebelle du clan.

PHOTO PAUL CHIASSON, LA PRESSE CANADIENNE

La petite vie

La petite vie a joué pendant quatre saisons complètes à Radio-Canada entre 1993 et 1998. En mars 1995, la comédie a fracassé un record avec une cote d’écoute évaluée, en direct, à 4 098 000 téléspectateurs. En dehors du Bye bye, on ne voit plus de tels chiffres astronomiques depuis que Numeris mesure les auditoires de manière électronique, plutôt que de se fier à des cahiers d’écoute que les volontaires remplissaient à la mitaine.

La popularité de La petite vie, même après la 72e reprise, ne dérougit pas. Depuis janvier, les vieux épisodes logés avant En direct de l’univers attirent une moyenne de 624 000 accros, ce qui bat plusieurs grosses nouveautés de l’hiver, que les réseaux relaient les soirs de semaine.

Claude Meunier a ramené ses personnages dysfonctionnels de La petite vie dans trois émissions spéciales (Le bogue de l’an 2000, Noël chez les Paré et Noël Story), en plus de visser son patriarche à la barre d’un talk-show, Le Ti-Mé Show, qui a duré deux saisons en 2015-2016.

Quant au bouleversant documentaire Dehors Serge dehors, il n’a pas encore été déposé sur les plateformes numériques, ce qui entrave son rayonnement, je trouve. Pour le visionner, il faut se déplacer en salle, où il passe de façon sporadique. Par exemple, ce vendredi à 19 h 30, les cinéastes Martin Fournier et Pier-Luc Latulippe le présentent à la Station Vu, un cinéma de quartier de Pointe-aux-Trembles, dans l’est de Montréal.

Pendant 68 minutes, Dehors Serge dehors suit la conjointe de Serge Thériault, Anna Suazo, sa fille adolescente Mélina, de même que les deux voisins du comédien, Robert et Jolande Racicot. On n’y voit Serge Thériault qu’une seule fois, de dos et en plan large, quand il se décide à consulter un psychiatre.

Depuis 2015, Serge Thériault sort rarement de sa maison dans la région de Joliette. Souffrant d’une grave dépression, il passe ses journées allongé sur le divan du salon, incapable de bouger.

Ce film intimiste et pas du tout voyeur montre l’impact de la maladie mentale sur l’entourage d’un proche qui refuse de se faire soigner. La conjointe de Serge Thériault, avec qui il vit depuis plus de 18 ans, est épuisée, vidée. Le voisin Robert, un ange qui habite l’appartement sous celui de Serge et Anna, n’a pas abandonné son « ami artiste », même si ce dernier ne lui ouvrait jamais la porte.

À La semaine des 4 Julie, fin janvier, Anna Suazo a confié que Serge Thériault prenait du mieux, mais qu’il n’avait pas revu son psychiatre depuis deux ans.

Cette histoire fend le cœur, vraiment. La Moman de tout le Québec souffre sous nos yeux et il n’y a rien à faire, à part lui dire qu’on l’aime et qu’on lui souhaite d’aller mieux.