Il y a plusieurs niveaux de lecture et de mises en abyme dans la drôle et dense minisérie Irma Vep de HBO, alors gardons ça le plus simple possible, d’accord ?

Fermons tout de suite un dossier pressant : Irma Vep ne réfère pas à la pièce de théâtre survoltée Le mystère d’Irma Vep avec Serge Postigo, Éric Bernier et leur arsenal de perruques funky.

Irma Vep — une anagramme du mot vampire — nous ramène d’abord au film qu’a tourné Olivier Assayas en 1996 avec sa conjointe de l’époque, l’époustouflante actrice hongkongaise Maggie Cheung. Et que racontait Irma Vep en 1996 ? L’histoire du tournage chaotique d’un vrai film muet, Les vampires, réalisé par Louis Feuillade en 1915.

Vous suivez toujours ? C’est bon. J’ai tout googlé pour vous éviter de le faire. Donc, Irma Vep, c’est le nom de l’héroïne du film culte Les vampires, découpé en dix épisodes d’une quarantaine de minutes chacun. L’actrice parisienne Musidora — muse des surréalistes — a campé cette Irma Vep en 1915, une femme fatale sulfureuse, une des premières vamps du cinéma français.

Voilà pour la mise en bouche. Poursuivons. Vingt-six ans après la création de son propre film, Olivier Assayas (Carlos, Clean) rebrasse Irma Vep en télésérie franco-américaine de huit épisodes d’une heure pour HBO, que la plateforme Crave propose en anglais et en version française sous-titrée.

L’intrigue de 2022 reste la même qu’en 1996, mais les comédiens changent, évidemment. En gros, il s’agit du remake d’un remake, orchestré par la même personne (Olivier Assayas).

Très méta comme concept. C’est une série sophistiquée de poupées russes qui s’emboîtent les unes dans les autres.

Oui, à la lecture, Irma Vep peut paraître autoréférentielle et hermétique. Ça ne l’est pas. Si moi, qui ai de la difficulté à suivre un tirage de La poule aux œufs d’or sans perdre le fil, j’ai réussi à embarquer dans Irma Vep, tout le monde le peut. Yolo la gang.

Photo Carole Bethuel, fournie par HBO

Scène de la série Irma Vep

Dans le Irma Vep de 2022, l’excellente Alicia Vikander (The Danish Girl, Ex Machina) campe une jeune actrice américaine qui cartonne dans des superproductions, dont elle se lasse. En peine d’amour et en quête de crédibilité professionnelle, elle accepte le rôle d’Irma Vep dans la nouvelle version du film Les vampires de 1915, que prépare un cinéaste réputé qu’elle admire.

La star de Hollywood débarque donc à Paris pour plusieurs mois et plonge dans ce projet ensorcelant, qui rend toute l’équipe de production un peu dingue, disons-le.

Il y a un volet Appelez mon agent hyper rigolo dans Irma Vep. C’est rempli d’autodérision, de secrets de coulisses et de piques sur le milieu — pas très sain — du cinéma. Sur le plateau, un acteur allemand (Lars Eidinger) complètement pété se gèle au crack tous les jours. Un jeune premier (Vincent Lacoste) multiplie les crises de vedette.

La costumière (Jeanne Balibar) s’improvise revendeuse de drogue et s’insurge contre la dictature des feuilles de service. Et le réalisateur névrosé (Vincent Macaigne), l’alter ego d’Olivier Assayas, survit grâce aux puissants médicaments qu’il avale.

Irma Vep a été captée dans la Ville Lumière avec une kyrielle d’acteurs français. Les dialogues y valsent habilement entre les langues de Shakespeare et de Molière. Le plus épatant, c’est la forme. La réalisation, à la fois moderne et rétro, est sublime.

Olivier Assayas intercale plusieurs scènes restaurées du film Les vampires de 1915 dans les épisodes d’Irma Vep de 2022, en plus d’y ajouter des plans de son film de 1996, où Maggie Cheung revêt le célèbre maillot de chat noir de la vamp mystérieuse.

Confus, le premier épisode, le seul offert pour le moment sur Crave, ne rend pas justice à cette œuvre truffée de jolis clins d’œil. Au troisième épisode, cette télésérie multicouche révèle tout son potentiel à travers les différentes époques qui s’entrelacent habilement et les réflexions sur l’art et la célébrité que propose Olivier Assayas.

Je sais, ça sonne prétentieux et pédant. Ça ne l’est pas. C’est franchement amusant et intelligent. Les épisodes sortent au compte-gouttes les lundis.

Où est Borgen, bordel ?

Vous avez été nombreux à me chicaner après la publication de ma chronique sur la quatrième saison de Borgen, arrivée sur Netflix le 2 juin. En gros, je résume vos messages : malgré toutes mes recherches, je ne trouve pas Borgen 4 sur Netflix, il n’y a que les trois premières saisons en ligne, vous vous êtes trompé, y aurait-il un problème avec mon compte ?

Non, votre Netflix n’est pas défectueux. Et oui, le quatrième chapitre de Borgen est présentement offert. Pour le visionner, il faut taper Borgen : Le pouvoir et la gloire dans l’outil de recherche. Netflix a regroupé les trois premières saisons sous l’onglet Borgen et placé la quatrième, à part, dans la case Borgen : Le pouvoir et la gloire.

Voilà, ce n’était pas plus compliqué que ça. Comme on dit au Danemark : selv tak !