L’érable, l’incroyable érable. Jean-Luc Boulay en a réclamé la sève sucrée à grands cris et bougonnements, lundi soir, lors d’un autre épisode grésillant des Chefs !, qui a ramené sa recrue étoile pour la deuxième semaine d’affilée : le foin d’odeur.

On ne parle pas ici du vulgaire foin de grange avec lequel Janette Bertrand bourrait son chaudron pour faire cuire son célèbre jambon de Pâques. Nenon. Le foin d’odeur dans Les chefs ! se faufile délicatement dans une pièce de viande avec une aiguille géante, comme l’a démontré la cheffe, couturière et mentore Colombe St-Pierre, que j’adore.

La semaine dernière, le foin d’odeur a parfumé le cœur coulant des sphères monochromatiques de parfait glacé aux framboises assemblées par Anthony, 25 ans, qui ressemblaient davantage à une sculpture de pop-art gastronomique qu’à un dessert de petit lundi tranquille.

Donc, pour faire chic lors de votre prochain méchoui/BBQ, videz le sac de la tondeuse, saupoudrez généreusement le contenu sur des boulettes de steak haché du Maxi et, ta-dam !, voici des tuiles de bœuf blondies au feu de bois et leurs bouquets d’herbes fraîches du jardin. De rien.

De retour au défi de cabane à sucre en mode estival, les aspirants chefs de l’équipe des jaunes, qui n’ont pas lésiné sur le sirop – ni en canne ni de poteau –, ont triomphé. « Ça goûtait l’érable et c’est ce qu’on voulait dans une cabane à sucre », s’est félicité le juge Jean-Luc Boulay devant une Élyse Marquis qui lui avait pourtant dit, quelques minutes plus tôt, et dans un langage plus châtié, c’est beau, Jean-Luc, on le sait, décroche.

PHOTO MARC-ANDRE LAPIERRE, FOURNIE PAR RADIO-CANADA

Mais il a raison, notre Jean-Luc, d’agiter ses marottes culinaires depuis si longtemps. Malgré leur talent débordant, les jeunes cuistots assaisonnent encore à moitié, ne goûtent pas leurs plats et ne versent pas assez de sauce dans leurs assiettes. Résultat ? Au troisième épisode, le duel des acras de morue a viré en « acratastrophe » (merci !) beaucoup trop salée pour la pauvre Marie, 26 ans, qui a accroché son tablier.

Cette 11e saison des Chefs ! atteint des niveaux de stress aussi élevés que le nombre de fois où Normand Laprise a prononcé le mot « soucisses » lundi. L’épisode commence à peine et déjà, ça crame dans le studio, un dégât se répand sur le plancher et l’animatrice Élyse Marquis, sur le bord d’une attaque de panique, déclare qu’ils n’auront jamais le temps de finir !

Comme un bon bordeaux, et non un petit jus fermier bardé d’une étiquette funky, cette émission de Radio-Canada vieillit très bien. La production a mis la pédale douce sur les « revirements imprévus » de mi-parcours et c’est parfait.

On aime voir la brigade bourdonner, s’entraider et suer au-dessus d’un carré de porc à manchonner. Ce n’est pas nécessaire de toujours leur imposer de faire cuire un steak à la chandelle, mettons. Amine est un des concurrents les plus sympathiques, tandis que les trois AAA, Anthony, Andersen et Adrian, tirent leurs camarades vers le haut.

Les lundis soir, on les regarde s’activer et on a le goût d’enfiler Crocs et gants noirs pour crier « chaud, c’est chaud » en sortant un fond de tarte du mégafour à deux portes.

L’anti Euphoria

À regarder Euphoria sur Crave, on s’imagine que tous les adolescents de 15 ou 16 ans sniffent la pharmacie de leurs parents, sèchent l’école et perdent leur dignité (et bien d’autres choses) dans d’immenses partys où la police n’intervient jamais.

PHOTO NETFLIX

Nick (Kit Connor) et Charlie (Joe Locke) sont les vedettes de la série Heartstopper.

La charmante minisérie britannique Heartstopper de Netflix, offerte en anglais et en français, montre une facette plus tendre et réaliste de l’adolescence, celle des émois, des questionnements, des papillons dans le ventre et de la découverte de soi. C’est écrit avec finesse et porté par de jeunes acteurs doués qui, contrairement à Euphoria ou Watatatow, n’ont pas 15 ans de plus que leurs personnages.

Heartstopper détaille la rencontre entre deux élèves dissemblables d’une école secondaire, soit Nick (Kit Connor) et Charlie (Joe Locke). Nick joue au rugby et gravite dans la clique des populaires. Batteur dans l’harmonie de l’école, Charlie subit de l’intimidation depuis qu’il a dévoilé son homosexualité.

Le hasard assoit Nick et Charlie à la même table d’une classe de français. Une amitié se noue entre les deux et Charlie développe vite une attirance pour Nick. Les amis de Charlie le mettent en garde : ne flanche pas pour Nick l’hétérosexuel qui te pulvérisera assurément le cœur.

Mais le rouquin Nick envoie des signaux mixtes, disons, à Charlie, et il s’attache de plus en plus à cet ado sensible aux cheveux bruns bouclés. Heartstopper ne montre aucune scène de sexe – seulement des baisers et des accolades. Par contre, les protagonistes dévoilent tout ce qui bat dans leurs cœurs et tout ce qui les tourmente. C’est beau de voir des adolescents avec autant de maturité émotive et d’ouverture.

Aussi, de courtes animations enjolivent les huit demi-heures de Heartstopper, qui abordent des enjeux de la communauté LGBTQ+ sans que ça paraisse forcé ou didactique. Et la trame sonore est ciselée à la perfection. Et Olivia Colman (The Crown) y joue un petit rôle qui vous fera l’aimer encore plus.