Ceux qui ont assisté aux dernières minutes de la performance Sisyphe de Victor Pilon se souviendront longtemps de l’émotion qu’ils ont ressentie.

Sur le coup de 18 h, mercredi, l’artiste a posé sa pelle, celle qui, pendant cinq semaines, à raison de six jours par semaine et de sept heures par jour, lui a permis de déplacer inlassablement une montagne de 50 tonnes de sable dans un hall du Stade olympique.

Le silence est tombé. Victor Pilon a pris un moment. Puis les centaines de spectateurs se sont mis à l’applaudir à tout rompre. Ils le remerciaient de leur avoir offert des moments grandioses, des images bouleversantes et des instants relevant littéralement de la méditation.

En construisant et déconstruisant une montagne à l’aide d’une pelle, Victor Pilon a réalisé une performance physique, émotionnelle et mentale hors du commun.

Les derniers moments d'un marathon
  • La Presse a assisté à l’ultime journée de la performance de Victor Pilon dans un hall du Stade olympique.

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    La Presse a assisté à l’ultime journée de la performance de Victor Pilon dans un hall du Stade olympique.

  • Pendant cinq semaines, à raison de six jours par semaine et de sept heures par jour, le performeur a déplacé inlassablement une montagne de 300 tonnes de sable.

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    Pendant cinq semaines, à raison de six jours par semaine et de sept heures par jour, le performeur a déplacé inlassablement une montagne de 300 tonnes de sable.

  • Cette performance artistique a été inspirée par Sisyphe qui, selon le mythe grec, a défié Zeus et Thanatos, dieu de la mort.

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    Cette performance artistique a été inspirée par Sisyphe qui, selon le mythe grec, a défié Zeus et Thanatos, dieu de la mort.

  • Des caméras ont filmé l’ensemble de cette performance en vue de la réalisation d'un film.

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    Des caméras ont filmé l’ensemble de cette performance en vue de la réalisation d'un film.

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Au total, l’artiste a déplacé, au cours de ces 26 jours, pas moins de 300 tonnes de sable et parcouru environ 600 kilomètres.

Une véritable folie !

Produite par Lemieux Pilon 4D Art, cette performance artistique a été inspirée par Sisyphe qui, selon le mythe grec, a défié Zeus et Thanatos, dieu de la mort.

Cet outrage lui a valu d’être banni aux enfers et condamné à faire rouler sans relâche jusqu’en haut d’une montagne escarpée une énorme pierre qui en redescendait aussitôt, sans jamais atteindre le sommet.

« C’est cet état qui nous amène à vivre pleinement chaque instant de notre vie. Ce mythe, c’est la quête suprême du sens pour les femmes et les hommes, c’est le silence déraisonnable du monde », m’avait confié Victor Pilon, en août dernier.

Lisez l’entrevue de Mario Girard avec Victor Pilon

Quelques minutes après la fin de l’expérience Sisyphe, Victor Pilon a tenu à remercier les nombreux collaborateurs qui ont travaillé avec lui. Pour ma part, j’insisterai sur Michoue Sylvain, une merveilleuse créatrice qui a accompagné l’artiste dans la façon de créer une gestuelle hautement poétique dont il a su brillamment faire usage. Tout cela a baigné dans de fabuleux éclairages d’Alain Lortie et un environnement sonore envoûtant de Marcin Bunar.

Des caméras ont filmé l’ensemble de cette performance. Un film doit être réalisé. Il renfermera beaucoup de beauté.

Victor Pilon a tenu à rendre hommage à Michel Labrecque, président-directeur général du Parc olympique, qui a eu l’audace d’accueillir une performance d’art contemporain dans ce temple du sport.

Puis, la voix faible et nouée, il a parlé des regards qu’il a croisés pendant ces jours difficiles, des mains qui ont accepté de prendre sa pelle pour l’aider dans cette tâche surhumaine.

Il a évoqué ces parents et leurs enfants qui l’ont aidé à transporter du sable avec leurs mains. Il a parlé de cette femme qui, après avoir empoigné la pelle de Sisyphe, a décidé de mettre un terme à une relation toxique.

Il n’y a pas de mots pour décrire l’émotion que j’ai vécue pendant ces 26 jours. C’est une montagne d’amour que j’ai reçue grâce à vous.

Victor Pilon

La mort tragique de son conjoint Sylvain, en 2017, a amené Victor Pilon à réaliser ce projet démesuré. « On a tous à faire le deuil de l’absurdité de la vie afin de, peut-être, parvenir à une forme de liberté, voire de bonheur, a-t-il écrit pour expliquer ce projet qui a nécessité une longue préparation physique. Ce projet est un effort pour comprendre l’éternel recommencement, saisir l’absurdité de l’existence et la quête du pourquoi qui nous habite tous. »

Lorsqu’à la toute fin de la performance, Victor Pilon a posé la pelle sur le sable avant de coucher dans son creux une photo de son amoureux décédé alors qu’on entendait la chanson Stay Tonight, de Dear Criminals, nous étions nombreux à avoir la gorge serrée.

Ultime hommage
  • La mort tragique de son conjoint, Sylvain, en 2017, a amené Victor Pilon à réaliser ce projet démesuré.

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    La mort tragique de son conjoint, Sylvain, en 2017, a amené Victor Pilon à réaliser ce projet démesuré.

  • Le créateur a décrit sa performance comme « un effort pour comprendre l’éternel recommencement, saisir l’absurdité de l’existence et la quête du pourquoi qui nous habite tous ».

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    Le créateur a décrit sa performance comme « un effort pour comprendre l’éternel recommencement, saisir l’absurdité de l’existence et la quête du pourquoi qui nous habite tous ».

  • À la toute fin de la performance, Victor Pilon a posé la pelle sur le sable avant de coucher dans son creux une photo de son amoureux décédé.

    PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE

    À la toute fin de la performance, Victor Pilon a posé la pelle sur le sable avant de coucher dans son creux une photo de son amoureux décédé.

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Des larmes ont coulé sous les masques.

C’est là que nous avons ressenti collectivement l’immense pouvoir de l’art.

N’était-ce pas, aussi, le but de ce geste artistique ?