Avec autant de talent à l’écran (Reese ! Jennifer !) et un budget de production délirant (Las Vegas ! Jet privé !), pourquoi la luxueuse série The Morning Show La matinale, en version française – ne nous réveille pas davantage ?

Il manque de sucre dans ce café peu corsé et moulu par les pros de chez Apple TV+. Les épisodes restent toujours tièdes, ils s’allongent inutilement et la touche d’acidité, en finale, ne se révèle jamais. Même l’arrivée fracassante de l’actrice Julianna Margulies, alias la redoutable Alicia Florrick dans The Good Wife, au troisième épisode, n’infuse pas la dose de caféine tant attendue.

Ce n’est ni mauvais ni imbuvable, juste décevant. Car on s’attend à tellement plus d’une production prestigieuse qui dispose de moyens financiers somptueux.

Je suis rendu à mi-chemin dans les 10 épisodes de la deuxième saison, offerte en français sur Apple TV+, et j’ai quand même le goût de progresser jusqu’au dernier générique.

Parce que New York. Parce que Jennifer Aniston, Reese Witherspoon et Julianna Margulies. Parce que le milieu dysfonctionnel de la télé. Parce que tous les personnages marchent vite en buvant du Starbucks. Tout ça me parle.

La première saison a été « comme si, couça », pour paraphraser Audrey de Si on s’aimait. La deuxième s’aventure sur un territoire plus rocambolesque, limite soap de torréfaction foncée, avec des intrigues tirées par les cheveux – toujours magnifiques de Jennifer Aniston, il faut le mentionner.

Il y aurait tellement de choses intéressantes à dire sur les médias, sur les jeux de coulisses d’une émission réveille-matin, sur le sexisme vécu par les cheffes d’antenne, sur les politiques internes discriminatoires, sur le rôle de la télé traditionnelle en 2021, sur l’influence des commanditaires ou sur la qualité de l’information mise en ondes. The Morning Show s’y trempe le gros orteil, sans s’immerger totalement. Comme si les scénaristes tiraient partout sans rien viser de précis.

Ce deuxième volet reprend tout de suite après le jubilatoire pétage de coche de l’animatrice Alex Levy (Jennifer Aniston), qui a exposé, en direct pendant sa propre émission, la culture toxique qui corrodait le réseau qui l’employait. Toute une bombe, qui a éclaboussé un paquet de cadres.

Recluse dans une superbe maison de campagne du Maine, quel endroit magnifique, Alex écrit ses mémoires. Mais il y a un autre livre qui suscite pas mal de curiosité. Celui de la journaliste Maggie Brener (Marcia Gay Harden), qui a enquêté sur le scandale sexuel ayant secoué le Morning Show et débouché sur le congédiement du présentateur vedette Mitch Kessler (Steve Carell).

Pendant de longs épisodes, qui durent plus d’une heure sans interruption publicitaire, l’équipe du Morning Show angoisse à propos du livre de Maggie Brener. Que va révéler Maggie Brener, qui a parlé à Maggie Brener, Maggie Brener va-t-elle tous nous couler avec sa plume incisive et son flegme légendaire ? La réponse viendra tard.

Dorénavant blonde, la pétillante Bradley Jackson (Reese Witherspoon) coanime toujours le Morning Show, mais espère traverser du côté des vraies nouvelles, celles du soir.

Le personnage le plus fascinant de la série, soit le grand patron Cory Ellison (Billy Crudup), hérite d’intrigues assez banales. La nouvelle patronne de la division information de la chaîne, Stella Bak (Greta Lee), lui vole la vedette et apporte la touche plus « éveillée » de l’histoire.

Attendez de voir la tempête que provoquera le gars de la météo quand il qualifiera Phil la marmotte d’« animal spirituel ». Un exemple parfait de petits boss qui accordent trop d’importance aux commentateurs de (supra) militants sur Twitter.

PHOTO FOURNIE PAR APPLE TV+


Julianna Margulies

Le pire de The Morning Show tourne autour de Mitch (Steve Carell), qui vit en exil en Italie. La documentariste avec qui il s’acoquine est insupportable. Très déçu aussi du personnage de Laura Peterson (Julianna Margulies), la rivale d’Alex Levy. Les auteurs auraient pu se forcer pour lui écrire du bon matériel et peut-être moins insister sur les numéros musicaux (ouf !) ou sur la COVID-19, qui s’immisce dans le récit (c’est assez). Apple TV+ sort les épisodes au compte-gouttes. Les deux premiers ont déjà été coulés, comme un café moyen.

Une île à la dérive

Ça ne va pas bien pour les insulaires de L’île de l’amour à TVA, qui ne vivent pas sur une île, mais bien à Los Cabos, au Mexique. L’émission de mercredi soir, qui résume les péripéties quotidiennes de ces gens en micromaillot, n’a été vue que par 191 000 personnes. C’est ce qu’on appelle atteindre les bas-fonds (marins).

En même temps sur Noovo, La semaine des 4 Julie a intéressé 293 000 téléphages. La minisérie Après de Radio-Canada a gagné la case horaire du mercredi 21 h avec ses 641 000 fidèles.

Pour en revenir à L’île de l’amour, c’est difficile de s’attacher aux participants, qui n’ont pas posé le « reculons sur les homards », pour le dire poliment. Je consomme beaucoup de téléréalités et je n’ai jamais embarqué dans le concept de Love Island, autant ici, aux États-Unis qu’en Angleterre.

L’horaire de L’île de l’amour est aussi super bizarre, avec ses heures de diffusion différentes pour une partie sur Évasion, l’autre sur l’application TVA+ et le reste sur TVA, à 23 h 05. Donnez-nous une carte et une boussole pour que l’on trouve enfin le trésor de cette île, qui n’en est pas une, faut-il le rappeler.