S’il y en a une que le patriarcat a opprimée, c’est bien June Osborne (Elisabeth Moss), alias Offred, alias Ofjoseph. Je veux dire, en quatre saisons de The Handmaid’s Tale, la pauvre June a été violée, torturée, séparée de sa fille Hannah, mutilée et encore violée. On ne parle vraiment plus de microagressions ici.

Pendant ces années de servante écarlate à Gilead, un régime théocratique totalitaire, June a ravalé sa rage et rêvé de vengeance. Contre le commandant Fred Waterford (Joseph Fiennes), un dictateur doublé d’un bourreau. Contre Serena Joy (Yvonne Strahovksi), l’épouse sadique qui a rédigé une partie des lois antiféministes de Gilead. Et contre ce gouvernement de terreur, qui a réduit les femmes au rôle d’esclaves, sexuelles ou domestiques.

On a vu la colère de June monter et monter durant cette quatrième saison de The Handmaid’s Tale, qui a fini par débloquer à mi-parcours, jour béni. Il fallait que ça bouge, cibole. Il ne se passait plus rien depuis trop longtemps.

Mais là, sous son œil !, les fidèles ont été récompensés mercredi soir lors de la grande finale du quatrième chapitre sur Crave+ et CTV Drama (il y en aura un cinquième, soyez rassuré). Le Club illico de Vidéotron offre présentement les quatre premiers épisodes en français de La servante écarlate. Pour ceux qui ont accumulé du retard dans la succession de gros plans du visage distors de June, remettez donc les ailes sur votre capine blanche et regardez vers le sol, comme l’enseigne depuis si longtemps Tante Lydia (Ann Dowd).

C’est bon ? Que le seigneur ouvre, maintenant. June a obtenu ce qu’elle désirait : la tête du commandant Fred Waterford, qui a été lynché en pleine nuit par une vingtaine de femmes aussi fâchées/révoltées que June. Les insurgées ont même coupé un doigt de Fred et l’ont posté à Serena, qui a subi le même traitement aux mains de son mari pour avoir osé lire un livre, rappelez-vous.

Bien sûr, il y avait un côté réjouissant de voir un homme subir sa propre médecine, après autant d’années d’impunité. Tiens, mon gros (mot d’église rétracté). C’est la loi du talion, œil pour œil, doigt pour doigt, euh, dent pour dent. L’image du cercle humain qui se refermait sur Fred Waterford était forte. Pour la première fois, les femmes ne lapidaient pas une des leurs.

Cette série dystopique a complètement tordu notre rapport à la violence : combien d’entre nous ont hurlé de joie quand June est sortie de la forêt, vêtue d’un manteau rouge symbolique, pour zigouiller Fred ? Une catharsis pour les téléspectateurs, qui n’en pouvaient plus de voir June la rebelle souffrir sans pouvoir se défendre.

Réfugiée au Canada, où la démocratie survit dans The Handmaid’s Tale, June a été confrontée à un fait dérangeant : le témoignage d’une femme ne vaut toujours pas celui d’un homme, même dans un pays dit égalitaire. En échange d’informations cruciales sur le fonctionnement de Gilead, Fred Waterford recouvrait sa liberté, malgré le récit ultra-incriminant et crédible de June devant le tribunal. Encore une fois, la voix de Fred écrasait celle de June.

C’est ce qui a fait exploser June, incapable d’être entendue (bis). Une bonne mère serait capable de lâcher prise, a confié June à son amie Emily (Alexis Bledel) dans une scène chargée. Déchirée entre sa famille et sa revanche, June a choisi de se venger. Qui la blâmera pour sa soif insatiable de justice ?

Le commandant Joseph Lawrence (Bradley Whitford), un personnage que j’adore, a cependant averti June que même s’il lui livrait Fred Waterford, elle ne serait pas satisfaite. C’est très vrai.

Physiquement, June a fui Gilead et ses lois moyenâgeuses. Mais dans sa tête, elle en reste prisonnière.

J’ai détesté la première moitié de The Handmaid’s Tale, prisonnière d’un cycle de fuite, de capture, de fuite et de torture insupportable. La dernière moitié a racheté, en partie, le surplace des cinq premiers épisodes. Enfin, June a vu le fruit (béni ?) de ses efforts.

La quatrième saison de The Handmaid’s Tale a été ponctuée de plusieurs invraisemblances. Le comportement bizarre de Tante Lydia a oscillé entre la marâtre meurtrière qui électrocute ses ouailles et la maman gâteau qui prend Janine (Madeline Brewer) sous sa cape brune. Parlant de Janine qu’on aime profondément, elle n’aurait jamais survécu à son escapade avec Offroad (ça, c’est June) en campagne : elle aurait été pendue comme les autres.

Et comment Nick Blaine (Max Minghella), papa de la petite Nichole, arrive-t-il à entrer et sortir de Gilead sans ne jamais éveiller aucun soupçon ?

Aussi, la prison de Serena est trop jolie, trop design, pour la cruauté glaciale du personnage. Qu’on l’envoie à Lietteville, ça presse, godspeed !