Alors qu’elle exposera sa nouvelle installation au musée Gardiner de Toronto fin octobre, nous sommes allés rencontrer Karine Giboulo dans son atelier de la rue Parthenais. La plasticienne rosemontoise de 42 ans poursuit ses créations de figurines miniatures qui racontent des histoires universelles sur la condition humaine. Son esthétisme et sa profondeur plaisent à de nombreux collectionneurs.

Talent précoce

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Karine Giboulo dans son atelier montréalais

Née avec des crayons et des ciseaux dans les mains, Karine Giboulo avait seulement 12 ans qu’elle exposait déjà ses créations… pour ses tantes, dans son village de Sainte-Émélie-de-l’Énergie. Par la suite, elle a étudié les arts au cégep du Vieux Montréal, la photographie au collège Marsan, l’histoire de l’art à l’Université de Montréal et la gravure au centre Saidye-Bronfman.

Elle a souvent créé ses œuvres à la suite de voyages : Chine, Inde, Kenya, Haïti, etc. Des figurines en argile polymère qui parlent de consumérisme, d’exploitation des travailleurs, d’injustice sociale, d’environnements dégradés, d’urbanisation outrancière, de disparition des traditions rurales. Des sujets graves traités avec lucidité et humanité, mais aussi une pointe de féerie et parfois d’humour.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Autoportrait de Karine Giboulo travaillant chez elle durant la pandémie

Elle avait 19 ans quand elle a vendu sa première œuvre à un collectionneur, grâce à l’opticien Georges Laoun (disparu l’an dernier), qui exposait ses œuvres dans son commerce. Elle a ensuite conquis les collectionneurs d’art contemporain, d’Alexandre Taillefer à Pierre et Anne-Marie Trahan en passant par la famille Desmarais, Nathalie Bondil, la McMichael Canadian Art Collection, en Ontario, et le Musée des beaux-arts de Montréal qui fut le premier musée à acquérir une de ses œuvres, All You Can Eat, en 2010, installation dévoilée lors de la Nuit blanche en 2008.

  • Une scène d’All You Can Eat (2008-2009)

    PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

    Une scène d’All You Can Eat (2008-2009)

  • Village démocratie, 2012

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Village démocratie, 2012

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Représentée par Art Mûr, elle a exposé dans les grands musées. N’hésitant pas à envoyer des propositions hors du Québec, elle a acquis, depuis 15 ans, une solide réputation en Ontario, en Nouvelle-Écosse et aux États-Unis où son œuvre Village électronique circule dans les musées-hôtels 21C du groupe Accor depuis des années. En ce moment, une de ses œuvres du projet collectif Errance sans retour sur les réfugiés rohingya (avec les cinéastes Mélanier Poirier et Olivier Higgins et le photographe Renaud Philippe) est exposée par Art Mûr à la Biennale de Venise.

Musée Gardiner

  • La salle de bains catastrophique : d’une machine à laver sortent du linge, des maisons et des sinistrés dans une rue inondée.

    PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

    La salle de bains catastrophique : d’une machine à laver sortent du linge, des maisons et des sinistrés dans une rue inondée.

  • Modélisation en 3D de l’environnement qui accueillera l’exposition au musée Gardiner

    PHOTO MICAH DONOVAN, FOURNIE PAR LE MUSÉE GARDINER

    Modélisation en 3D de l’environnement qui accueillera l’exposition au musée Gardiner

  • La grand-mère de Karine Giboulo tricote avec la laine d’un vieux chandail de l’artiste. Durant l’expo, la figurine sera placée dans un placard.

    PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

    La grand-mère de Karine Giboulo tricote avec la laine d’un vieux chandail de l’artiste. Durant l’expo, la figurine sera placée dans un placard.

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Du 20 octobre au 7 mai, Karine Giboulo présentera Housewarming/Ma maison de plain-pied au musée Gardiner. Un travail évoquant la pandémie sera déployé dans le musée à l’intérieur d’une maison reconstituée. On retrouvera l’ambiance durant le confinement, avec la mise en scène de symboles liés à l’adaptation à la maladie. « Avec aussi des références sur ce qui s’est passé durant cette période, dit-elle. Le réchauffement climatique, les inondations, notre façon de consommer, etc. La maison est un prétexte pour faire réfléchir sur ce qui se passe sur la planète. »

Les 60 œuvres de ce corpus sont en cours de transfert à Toronto. Une grande partie d’entre elles sont déjà vendues. L’expo pourrait toutefois voyager après son passage dans la Ville Reine.

Les Rohingya

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Vue de l’installation pour Errance sans retour, présentée en 2020 au MNBAQ

Après le projet du Gardiner, Karine Giboulo s’attaquera à une deuxième phase du corpus Errance sans retour. « Nous allons faire un court métrage avec Mélanie Poirier et Olivier Higgins sur Mohammed Shofi, ce Rohingya qui vit à Québec et dont des membres de la famille sont réfugiés au Bangladesh. Il était le narrateur de l’histoire, lors du premier film présenté au Musée national des beaux-arts du Québec. Dans ce court métrage intitulé provisoirement Shofi, on racontera son histoire quand il était dans les camps. Ce sera illustré avec mes figurines. »

Voir le projet initial d’Errance sans retour

L’atelier

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Karine Giboulo travaille sur une des œuvres (ressemblant à un pâté chinois !) qui seront exposées au musée Gardiner, à Toronto.

Karine Giboulo est un bourreau de travail. « Je travaille beaucoup. Tout le temps ! », dit-elle, en riant. Ses figurines requièrent environ une journée de travail. Elle en fait des dizaines pour chaque corpus. Toutes conçues dans sa tête, après qu’elle eut été inspirée par l’actualité et des documentaires. « Mon cerveau pense en 3D. Parfois je dessine, mais pour moi, c’est plus difficile d’aplatir ! Je vois l’image en 3D. »

Quand elle se concentre sur ses petites sculptures, Karine Giboulo est dans un autre monde. Totalement immergée dans son souci de décrire ses personnages avec réalisme. Et corpus après corpus, elle est toujours en quête de mieux faire. « Mon rêve est de parvenir à créer quelque chose qui m’aura impressionnée de l’avoir fait, dit-elle. C’est un peu obsessif-compulsif, mon affaire ! J’ai plein d’idées dans la tête. Je ne rêve pas de notoriété. J’aime que mon art soit accessible à tout le monde. Je suis heureuse avec les gens. »

Quelques réalisations

  • Village électronique, 2008-2009

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Village électronique, 2008-2009

  • Une autre œuvre de Village électronique

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Une autre œuvre de Village électronique

  • Une œuvre de All You Can Eat

    PHOTO FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Une œuvre de All You Can Eat

  • Vue de l’exposition Bulles de vie présentée en 2007 à l’Eye Level Gallery d’Halifax

    PHOTO ROBERT SKINNER, FOURNIE PAR L’ARTISTE

    Vue de l’exposition Bulles de vie présentée en 2007 à l’Eye Level Gallery d’Halifax

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