(Paris) Une reproduction du squelette du cheval préféré de Napoléon, Marengo, suspendu au-dessus de son tombeau aux Invalides : l’installation de l’artiste contemporain Pascal Convert suscite l’indignation de fans de l’Empereur, en pleine commémoration du deuxième centenaire de sa mort.

Mémento Marengo a été installé dans le cadre du parcours « Napoléon ? Encore ! » aux Invalides, à Paris, auxquels ont été invités à participer une trentaine d’artistes contemporains — certains connus, de Georg Baselitz à Laurent Grasso —, d’autres très jeunes et émergents.  

Le projet conduit depuis deux ans par Eric de Chassey, directeur de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA), était clair : donner pleine liberté aux artistes de s’exprimer dans la diversité. La majorité des œuvres ont été créées pour le parcours.

Pascal Convert a repris un rite antique évoqué par Hérodote qui voulait que les chevaux accompagnent leur cavalier dans la mort, en reconstituant en 3D le squelette du pur-sang, conservé au National Army Museum de Londres.

PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

L'artiste Pascal Convert

Marengo était devenu le cheval préféré de Napoléon qui l’avait monté dans plusieurs batailles jusqu’à Waterloo en 1815, où il a été capturé par les troupes de Wellington.

« Cette œuvre, explique Éric de Chassey à l’AFP, je savais qu’elle pourrait susciter des incompréhensions, mais elle est tout sauf irrespectueuse. Paradoxalement, cela permet une forme de réhumanisation de Napoléon. La réalité de la guerre c’est la mort. On a depuis l’Antiquité cette image des guerriers qui montent au ciel à cheval. Dans les tombes de l’Antiquité, le cavalier était enterré avec son cheval ».

PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les critiques ont fusé d’associations et des inconditionnels de l’Empereur.

Un tweet de Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon, s’étonnait déjà du projet fin avril : « Réhumaniser Napoléon en suspendant un squelette de cheval en plastique au-dessus de son tombeau, on rêve ! ».  

« Grotesque et choquant », tranche pour sa part l’historien Pierre Branda, lui aussi membre de la Fondation Napoléon, dans une tribune publiée par le quotidien Le Figaro.

D’autres artistes contemporains invités au Musée de l’armée n’ont pas hésité à ironiser et à démonter l’image du héros dans des salles toutes à la gloire de l’Empereur : Yan Pei-Ming montre Napoléon se couronnant lui-même, Damien Deroubaix le présente en esclave noir enchaîné, Pavel Pepperstein montre un Napoléon casqué inquiétant sur fond de bulbes de Moscou.

Ange Leccia propose une superbe installation filmique monumentale sur l’exil à Saint-Hélène, avec les cieux et la mer que Napoléon avait quotidiennement sous les yeux : « Ce qui m’a intéressé, c’est le Napoléon mélancolique, qui a perdu, qui n’est plus chez lui. Les hommes passent, la nature lave l’histoire », note l’artiste.