Le centenaire du peintre Jean Paul Riopelle, né le 7 octobre 1923, sera célébré en grande pompe. De nombreuses et importantes manifestations souligneront l’anniversaire de naissance de ce pilier du mouvement automatiste.

Depuis des mois, la directrice générale de la Fondation Jean Paul Riopelle, Manon Gauthier, travaille avec acharnement à mettre sur pied les nombreux évènements qui s’étendront sur plusieurs mois. Comme on peut s’y attendre, des expositions mettront à l’honneur l’œuvre vaste et riche de l’artiste.

Mais comme Riopelle a très souvent lié son travail à d’autres formes d’art, ce centenaire prendra plusieurs formes en suscitant la création d’une œuvre musicale à grand déploiement, d’une production théâtrale et d’un spectacle de cirque. À cela s’ajoute la production d’une série documentaire, de même que la publication d’un ouvrage biographique. Une place de choix sera par ailleurs réservée à l’art numérique.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

L’étang – Hommage à Grey Owl, de Jean Paul Riopelle, avait été transporté par l’équipe de la conservation du Musée des beaux-arts de Montréal depuis le pavillon Desmarais, où il était entreposé, vers le pavillon Hornstein, en vue de sa présentation, en novembre dernier, dans le cadre de l’expo Riopelle : à la rencontre des territoires nordiques et des cultures autochtones.

C’est du jamais-vu pour un artiste québécois.

« Il y a des projets qui s’ajoutent toutes les semaines, dit Manon Gauthier. Tout cela est très excitant. Ce qui est bien, c’est que toutes les idées se complètent.

L’idée est de porter Riopelle à la scène, à l’écran, de l’amener dans nos les bibliothèques et dans les salles de classe. Cette célébration se veut une grande mosaïque, à l’image de certaines de ses toiles.

Manon Gauthier, directrice générale de la Fondation Jean Paul Riopelle

Manon Gauthier souhaite également la tenue d’un grand symposium international autour de l’œuvre de Riopelle, un artiste qui a vécu autant d’années au Québec qu’en France.

Cet anniversaire coïncide avec le 75e anniversaire du mouvement automatiste, de même qu’avec le 100e anniversaire de naissance de Françoise Sullivan et celui de Madeleine Arbour, deux signataires du mythique manifeste Refus global. Il est donc à parier que l’année 2023 sera portée par le talent et l’énergie de ces artistes.

Les premières annonces seront faites en octobre prochain. « Nous serons à un an du début des célébrations, car nous souhaitons tenir les premiers évènements dès octobre 2022, explique Manon Gauthier. Cela va ensuite s’étendre jusqu’en 2023 et même au-delà. Tous les projets vont émerger du Québec et vont connaître un rayonnement international. Il faut préciser que l’œuvre de Riopelle est présente dans une soixantaine de villes et une quinzaine de pays. »

Où ira la Fondation Riopelle ?

Le projet de création d’un lieu pouvant accueillir des œuvres de Riopelle provenant de collections privées et publiques sera arrimé à l’ensemble de ces manifestations. On espère pouvoir procéder à une annonce très bientôt. Parmi les nombreuses avenues envisagées depuis des mois, celle de la bibliothèque Saint-Sulpice est toutefois retirée du lot.

PHOTO MICHEL GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jean Paul Riopelle, photographié le 25 septembre 1985

« Depuis un an, c’est une proposition qui a été évoquée publiquement, dit Manon Gauthier. On trouvait cela très intéressant. Mais on n’arrivait pas à obtenir les documents nous permettant de juger de l’état du bâtiment. Une fois que nous les avons obtenus, on s’est rendu compte que l’état de décrépitude est alarmant. »

Mais au-delà de cette réalité, le manque de latitude a convaincu la Fondation Jean Paul Riopelle que le choix de la bibliothèque Saint-Sulpice n’était pas approprié. Lorsque Manon Gauthier a pris connaissance de l’inventaire complet des biens patrimoniaux classés qui sont rattachés à la bibliothèque Saint-Sulpice, elle a compris que la marge de manœuvre dont elle disposerait serait trop mince.

On s’est rendu compte rapidement que ce bâtiment n’est pas compatible avec une vocation muséale. Prenons juste l’exemple des vitraux auxquels on ne peut toucher, cela a un impact sur la lumière. On doit pouvoir avoir un contrôle absolu là-dessus. Pour un endroit qui présente des tableaux et des œuvres sur papier, ça ne peut pas marcher.

Manon Gauthier, directrice générale de la Fondation Jean Paul Riopelle

C’est cette impossibilité de conversion muséale qui a fait reculer la Fondation Jean Paul Riopelle. « Comme on ne peut pas utiliser la grande salle ni le magasin où se trouve le rayonnage des livres, on réalise que le ratio d’occupation réelle est minime, reprend Manon Gauthier. Les seuls endroits qui auraient pu être utilisés sont en sous-sol, là où se trouve un auditorium. Au bout du compte, Saint-Sulpice devenait pour nous une grande salle d’accueil pour des salles qui auraient été cachées. »

Plusieurs autres options ont été identifiées depuis l’automne dernier. « Il y a des propositions qui sont venues du secteur privé, de promoteurs immobiliers et de consortiums, dit Manon Gauthier. Pour ce qui est des terrains vacants dans des lieux centraux, ils sont peu nombreux à Montréal. »

La Fondation a aussi reçu des invitations à venir s’installer dans le complexe environnemental de Saint-Michel à Montréal, ou à Mont-Saint-Hilaire. « Il y a par ailleurs un groupe de citoyens qui ont un grand intérêt pour l’ancien site du MAC situé près de la Cité du Havre. Le bâtiment appartient toujours à Loto-Québec, mais c’est un autre endroit qui a été négligé. »

Finalement, il a été question de l’École des beaux-arts, rue Saint-Urbain. « Ce qui est intéressant avec cette proposition, c’est le terrain adjacent qui permettrait l’ajout d’une aile. Cela dit, on m’a informée qu’il y avait déjà un projet en marche avec ce lieu. »

La Fondation Jean Paul Riopelle continue d’étudier activement diverses options. Est-ce que le lieu qui sera choisi doit obligatoirement être situé à Montréal ? Et est-ce que ce lieu pourrait être pluriel ? Manon Gauthier n’a pas souhaité entrer dans les détails, mais a eu cette réponse.

« La Fondation continue de rêver grand pour ce lieu. Symboliquement, le but est de ramener Riopelle à la maison, dans sa ville natale. Pour le moment, nous regardons tous les scénarios. On espère que, dans sa finalité, le projet pourra prévoir un lieu montréalais. Mais cela n’exclut pas une exploration plus vaste d’autres options à travers la province. »