(Paris) Le Centre Pompidou s’enrichit d’une collection d’Art brut du collectionneur Bruno Decharme, une forme d’art mal reconnue à laquelle une salle permanente sera consacrée pour la première fois, a annoncé lundi le Musée national d’art moderne.

« L’Art brut », notion artistique créée et défendue par le plasticien Jean Dubuffet, réunit des artistes autodidactes, spirites, souffrant de troubles mentaux ou marginaux.

Un total de 921 œuvres de 242 artistes français et étrangers (arts plastiques et graphiques, photographie) vont être présentées par roulement de six mois dans cette salle au cinquième étage de Beaubourg, non loin des œuvres de Jean Dubuffet. Elle s’ouvrira le 23 juin sous le nom d’Art brut : Donation Bruno Decharme.

« Cette permanence évitera la dilution de la collection », s’est félicité le collectionneur auprès de l’AFP, qui ajoute donner les plus belles œuvres de (sa) collection ».

Bruno Decharme raconte avoir démarré dans les années 1970 cette collection qui compte 6000 pièces de 420 artistes du milieu du XIXe siècle à nos jours. Il en a assuré la promotion grâce à une association, abcd (« art brut connaissance & diffusion »).

Il explique que ses études de philosophie et d’histoire de l’art l’ont amené à se passionner « pour ces pensées transversales, archaïques, très particulières, permettant de trouver des pistes sur l’interrogation du monde, que l’on trouve chez les grands mystiques, hors des cultures dominantes. Des personnes autodidactes qui inventent parfois des langues, de nouveaux graphismes ».

« Il y a 50 ans, a rappelé le collectionneur, Dubuffet voulait donner sa collection aux institutions parisiennes, mais c’était trop iconoclaste, et le Centre Pompidou possède peu d’Art brut ».

Il a obtenu qu’un pôle de recherche dédié s’ouvre au sein de la bibliothèque Kandinsky, sous la direction de la chercheuse et fondatrice de l’association abcd Barbara Safarova, qui travaille avec lui depuis 20 ans.

Le galeriste Christian Berst, qui a consacré en quinze ans de multiples expositions à l’Art brut, salue « l’audace du Centre Pompidou » qui va accueillir plus de 50 artistes que sa galerie défend et « ouvre ainsi un nouveau chapitre dans l’histoire de l’art ».

« Alors que la France est son berceau, l’Art brut s’est heurté à une incurie d’institutions muséales incapables de reconnaître son champ artistique », ajoute-t-il, assurant que « le Moma et le Metropolitan à New York sont aujourd’hui très intéressés » et pourraient rapidement emboiter le pas au Centre Pompidou.