Si le numérique promettait d'universaliser la connaissance, dans les faits, il est souvent difficile pour le citoyen de distinguer ce qui est vrai de ce qui est faux. Le vrai du faux est le thème du 11festival Art souterrain, qui a débuté samedi passé, sur six kilomètres du réseau piétonnier souterrain de Montréal. Voici quelques oeuvres d'artistes qui se sont intéressés à l'authenticité et à l'importance de l'information.

Raphaël Fabre 

Cet artiste français expose au complexe Guy-Favreau ce qui semble être une photo de lui-même, mais qui est en fait un avatar, une représentation de son visage créée sur ordinateur. En 2017, il avait fourni cette image pour obtenir sa carte nationale d'identité et l'administration française l'a acceptée. Le plus ironique est que cette oeuvre de grand format est exposée tout près des locaux des services fédéraux où l'on fait sa demande de passeport canadien...

Martin Le Chevallier 

Artiste français, Martin Le Chevallier est l'un des trois commissaires du festival Art souterrain. Il y présente plusieurs oeuvres, dont cette intervention sur une des portes du complexe Guy-Favreau. Est-ce une porte privée ou publique ? À quoi donne-t-elle l'accès ? Rien ne l'indique. Martin Le Chevallier a placé le mot réalité sur la porte, ce qui risque d'intriguer les passants ! « J'aime jouer avec les lieux et produire du sens », dit-il.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

L'une des oeuvres de Martin Le Chevallier présentées au festival Art souterrain

Molly Soda 

Célébrité de l'internet, Molly Soda se construit des personnages pour s'interroger sur la notion d'identité et sur le phénomène des auto-mises en scène sur les réseaux sociaux. À Art souterrain, l'artiste new-yorkaise expose, près des magasins chinois du complexe Guy-Favreau, des photographies dans lesquelles elle joue le rôle d'une vedette qui se serait fait surprendre par un paparazzi. En maillot de bain sur une plage, sortant d'une voiture, sur un trottoir ou dans une parfumerie...

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Les photographies de l'artiste new-yorkaise Molly Soda

Fayçal Baghriche

Cet artiste parisien a tourné, en 2008, près du Louvre, des images de touristes se faisant photographier devant ce qui semblait être un acteur mimant une sculpture égyptienne. Mais il s'agissait d'un mannequin en plastique recouvert d'un tissu doré et non d'un mime. La vidéo Philippe de 4 min 24 s, autour de cette « fausse fausse sculpture », mêle humour et réflexion sur les absurdités de notre époque.

IMAGE TIRÉE DE LA VIDÉO PHILIPPE, DE FAYÇAL BAGHRICHE, ART SOUTERRAIN

La vidéo Philippe, de Fayçal Baghriche, au complexe Guy-Favreau

Brendan George Ko

Le photographe torontois présente à Art souterrain (dans le couloir menant du complexe Guy-Favreau au Palais des congrès) des clichés de sa série And Cheese ! de 2013. Des photos qui semblent arrangées avec le gars des vues et qui, pourtant, ont toutes été prises sur le vif. Des photos anecdotiques, mystérieuses, voire invraisemblables, comme cet enfant qui se met la tête dans le sable. Des images qui évoquent le fait que, de nos jours, la réalité, quand elle est surprenante, peut rendre suspicieux...

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L'une des photos de la série And Cheese !, de Brendan George Ko

Eric Pickersgill

Removed est un corpus que l'artiste américain Eric Pickersgill a réalisé en 2016 après avoir constaté combien nous sommes devenus esclaves des cellulaires, tablettes et autres écrans de télévision. Il a pris en photo des personnes qui ont pris la pose qu'ils avaient quelques instants plus tôt avec un appareil électronique en main. Un travail sur les implications sociales de cet engouement généralisé pour les nouvelles technologies numériques.

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Removed, d'Eric Pickersgill

Edward Hillel

Cette oeuvre de l'artiste new-yorkais Edward Hillel est une critique de notre manque de curiosité. Hillel a créé Le Terril, plateforme de gazon synthétique qui donne l'illusion d'une aire de repos. L'oeuvre d'art, avec ses bords en faux charbon et ses produits dérivés du pétrole, évoque le fait qu'un modèle économique nuisible à la planète perdure malgré les sombres prévisions. « Les gens s'approprient ce lieu et s'assoient sur les chaises sans se poser de questions », dit Frédéric Loury, fondateur d'Art souterrain.

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Le Terril, d'Edward Hillel